Le silence de la mer ou Le manifeste de la Résistance

Après la rafle. Peinture. Centre National Jean Moulin – Bordeaux, exposition NUIT et BROUILLARD de Jean Jacques Morvan

« ... contrairement à ce que pensait Sartre, le Silence de la mer n’était pas un texte de circonstance ni son public seulement l’homme de 1941 : “Un an et demi après la défaite, [le roman de Vercors] était virulent, vivant, efficace. Dans un demi-siècle, il ne passionnera plus personne. Un public mal renseigné le lira encore comme un conte agréable et un peu languissant sur la guerre de 1939. Il paraît que le bananes ont meilleur goût quand on vient de les cueillir : les ouvrages de l’esprit, pareillement, doivent se consommer sur place.” [1] Car Vercors voulut donner à sa nouvelle un sens et une portée universels qui la rendissent encore lisible bien après la fin du conflit ; et, en tout cas, il ne désirait rien écrire que pût engloutir le mépris où avait sombré la littérature de propagande après 1918. Et il y a bien réussi puisque plus d’un demi-siècle après la parution du Silence, nous le lisons encore non comme un simple conte, mais comme un appel à la plus profonde Résistance : celle qui non seulement fait effort contre l’ennemi extérieur mais qui surtout, et d’abord, ne cède pas à la barbarie qui sommeille en chaque homme : l’égoïsme, véritable source de toutes les guerres, terreau de tous les champs de bataille où la vanité des chefs lance les peuples les uns contre les autres. » L. P. Rivera Lynch

Le mémoire que nous publions, et dont nous venons de donner un extrait, a près de vingt ans. Il est l’ouvrage d’une jeune sud-américaine fraîchement arrivée sur le continent européen. Comme le père de Vercors, Louis Bruller venu de Hongrie, évoqué dans La Marche à l’Étoile sous les traits de Thomas Muritz, Patricia Rivera Lynch éprouvait une passion pour la France. Au Musée Jean Moulin de Bordeaux où elle s’installa bientôt, elle prit connaissance de la Résistance à travers les témoignages très choquants de l’horreur nazie, à travers également l’illustration de la détermination et du courage des Partisans. Puis se furent la découverte de Gurs dans les Pyrénées, un voyage en Allemagne, la visite du camp de Terezin en Tchécoslovaquie. Elle n’était pas familiarisée avec cette partie de l’Histoire européenne qui la bouleversa et à la fois l’interrogea sur la capacité de destruction de l’homme. Chez Vercors elle trouva plus tard une façon peu commune d’aborder le sujet. Elle saisit l'occasion d’un travail universitaire pour approfondir l’oeuvre majeure de cet auteur, Le silence de la mer, à la lumière d’un autre de ses ouvrages, généralement moins connu, La Bataille du silence, publié en 1967 aux Presses de la Cité. Admin

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[1] J.-P. Sartre, Situations I (Gallimard), cité par Pierre de Boisdeffre, Une histoire vivante de la littérature d’aujourd’hui (Librairie académique Perrin, Paris), p. 142. Et à la Libération, Sartre — qui fut pourtant si soucieux de sa propre renommée — semblait bien ne pas douter que Le Silence comme son auteur dussent connaître pareille postérité. Voir ci-après note 57.
 

Images : APRÈS LA RAFLE – Peinture. Centre National Jean Moulin – Bordeaux. Exposition Nuit et Brouillard  de Jean Jacques Morvan.

 

Commentaire(s)

Permalien

Un essai touchant et profond sur cet auteur injustement minoré voire ignoré.

En guise d'antidote contre cet oubli on trouvera sur le site de Nathalie Gibert-Joly, agrégée et docteur ès lettres titulaire d'une thèse sur Vercors, une présentation générale de Jean Bruller ainsi que de multiples pistes de lecture et d'approfondissement inédites :

http://vercorsecrivain.pagesperso-orange.fr/index.html