- mer, 2010-12-29 01:12
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PANORAMA DES RÉVÉLATIONS ET INFORMATIONS LES PLUS SIGNIFICATIVES PUBLIÉES PAR « LE MONDE »1 Plus de cent vingt articles ont été publiés après étude des 251 287 télégrammes diplomatiques américains
Le Monde a publié, depuis le 28 novembre, plus de cent vingt articles sur les télégrammes diplomatiques du département d’État américain. Sur les 251 287 câbles obtenus par WikiLeaks et étudiés en exclusivité par cinq journaux – The New York Times aux Etats-Unis, The Guardian au Royaume-Uni, Der Spiegel en Allemagne, El Pais en Espagne et Le Monde en France –, 1897 ont été publiés à ce jour en appui des articles.
ÉTATS-UNIS Espionnage Une directive secrète de 2009 indique les consignes de Washington à ses diplomates en matière d’espionnage. Un mémo adressé à la mission à l’ONU, à New York, réclame des diplomates qu’ils fournissent « toute information biographique et biométrique » sur leurs interlocuteurs, y compris leurs alliés : informations personnelles telles que « numéros de cartes de crédit ; numéros de cartes de fidélité de compagnies aériennes », et biométriques telles que « empreintes digitales, photographies faciales, ADN et scanners de l’iris ».
GUANTANAMO « Laissez-les mourir ! » Lorsque Washington entreprend de chercher des pays d’accueil pour les détenus de Guantanamo, le ministre de l’intérieur du Koweït, cheikh Jaber Al-Khalid Al-Sabah, rétorque : « Laissez-les mourir ! S’ils sont pourris, ils sont pourris. Il vaut mieux s’en débarrasser. » Le roi saoudien Abdallah a pour sa part « une idée » : implanter sur les intéressés une puce électronique qui permettra de les pister.
FRANCE « Sarkozy l’Américain » Nicolas Sarkozy, qualifié de « président le plus proaméricain depuis la seconde guerre mondiale », fascine les diplomates américains. La candidature Le 1er août 2005, M. Sarkozy annonce aux diplomates américains sa candidature à la présidentielle française, seize mois avant de le dire aux Français. Lors de cette rencontre, « M. Sarkozy a exprimé son admiration pour le président Bush. Sarkozy a dit que, comme le président [Bush], lui aussi mettait un point d’honneur à tenir sa parole et à affronter honnêtement les problèmes réels du pays. » Le veto à l’ONU M. Sarkozy, alors ministre de l’intérieur, se déclare opposé à l’invasion américaine de l’Irak tout en critiquant la décision de Jacques Chirac et Dominique de Villepin d’utiliser le veto de la France au Conseil de sécurité de l’ONU, « affirmant que c’est quelque chose que lui “ne ferait jamais” ». La guerre en Irak En 2006, Nicolas Sarkozy indique, devant un ministre de George Bush, qu’il pourrait, s’il est élu président, envoyer l’armée française en Irak. « Sarkozy a déclaré, note un télégramme, que la France et la communauté internationale allaient devoir aider les États-Unis à résoudre la situation en Irak. Peut-être en remplaçant l’armée américaine par une force internationale. » L’OTAN Une fois Nicolas Sarkozy élu président, les diplomates américains suivent de près les dossiers de politique étrangère. Sur l’OTAN, ils en savent à une époque plus que les Français : « Les plus proches conseillers de Sarkozy ont été clairs sur le fait qu’il a déjà pris la décision de réintégrer la France dans le commandement militaire intégré. » L’Élysée a par ailleurs évoqué un retour de la force nucléaire française dans l’OTAN. Le 2 février 2010, le conseiller de l’Élysée pour les affaires stratégiques, François Richier, affirme que si les États-Unis cherchaient à diminuer le rôle des arsenaux nucléaires dans le concept stratégique de l’OTAN, cela « aurait un impact sur la capacité de la France à intégrer ses forces nucléaires dans l’OTAN ». Officiellement, la France a exclu de renoncer à l’autonomie totale de sa force de frappe. Les documents américains montrent que, dans le huis clos des discussions, Paris a envisagé un retour dans l’OTAN portant sur le nucléaire. La Turquie Les diplomates américains rapportent un épisode étonnant, dans un télégramme intitulé « Personne pour lui dire “non” », consacré à des conseillers de l’Élysée « qui évitent de contredire le président ou de provoquer son mécontentement » : « Ils ont détourné l’ avion du président pour éviter qu’il voie la tour Eiffel éclairée aux couleurs de la Turquie à l’occasion de la visite du premier ministre Erdogan (une décision prise par la Mairie de Paris). »
FRANCE – IRAN La mission secrète de l’Élysée Décrite comme « la pointe du glaive » des efforts pour endiguer le programme nucléaire iranien, la France a aussi tenté, quelques mois après l’arrivée au pouvoir de Nicolas Sarkozy, en 2007, une diplomatie secrète avec l’Iran. Les télégrammes révèlent une mission confidentielle à Téhéran, en août 2007, d’un émissaire de l’Elysée, François Richier, qui s’est entretenu avec Ali Akbar Velayati, le conseiller diplomatique du Guide suprême iranien, Ali Khamenei. La tentative a fait long feu, car « Velayati partait de l’idée erronée que M. Sarkozy libérerait la France de sa “dépendance” envers les Etats-Unis ». L’affaire Clotilde Reiss L’Élysée a délibérément exagéré le rôle joué par la Syrie dans les tractations pour faire sortir de prison la chercheuse française Clotilde Reiss, retenue en Iran de juillet 2009 à mai 2010 sur des accusations d’« espionnage ». Un télégramme d’août 2009 cite ainsi le conseiller de l’Élysée François Richier : « Bien sûr, nous ne savons pas si les Syriens ont fait quoi que ce soit, mais nous les avons remerciés quand même. » L’objectif, selon les Américains, est de « valider la politique de Nicolas Sarkozy d’ouverture à la Syrie ».
FRANCE-BRÉSIL Les transferts de technologie militaire Derrière la « lune de miel » entre Nicolas Sarkozy et le président brésilien Lula da Silva se cachent des transferts de technologie militaire française destinés à permettre au géant d’Amérique latine de se doter d’une base industrielle de défense. Les télégrammes révèlent que lors des négociations sur le projet de vente d’avions militaires Rafale, « les Français ont depuis le début garanti aux Brésiliens qu’ils livreraient les codes informatiques du Rafale ». M. Sarkozy a promis, dans une lettre à son homologue, « un transfert sans restrictions de renseignements technologiques ». Le Brésil, analysent les Américains, souhaite « produire le Rafale sur son territoire, et éventuellement le vendre à travers l’Amérique latine ».
OTAN–RUSSIE Le « plan balte » secret « Aigle gardien » est le nom des plans de défense que l’OTAN a décidé d’élaborer pour rassurer les trois États baltes qui se sentaient menacés après l’intervention militaire russe en Géorgie en août 2008. Les télégrammes dévoilent les dessous de cette négociation secrète entre alliés visant à doter les nouveaux membres de l’Alliance (entrés en 2004) d’un dispositif de protection renforcé. Les documents révèlent à quel point les alliés ont pris soin d’entourer ces plans d’une grande confidentialité. Ils sont entrés en vigueur début 2010.
RUSSIE Le FSB contre l’ambassade américaine À Moscou, les services secrets russes harcèlent les Américains. L’ambassade souligne à plusieurs reprises les opérations de déstabilisation et de harcèlement contre ses employés : menaces de mort, intrusions aux domiciles, montages photo compromettants… « Nous n’avons aucun doute que cette activité a pour origine le FSB », écrit l’ambassadeur en novembre 2009.
CHINE Les attaques contre Google En janvier 2010, Google annonce que ses serveurs ont été victimes de cyberattaques venant probablement de Chine. Un informateur chinois haut placé fait savoir à l’ambassade américaine que cette opération a été préparée et coordonnée au plus haut niveau « au sein du bureau d’information du Conseil d’État, sous la supervision de deux membres du comité permanent du Bureau politique ». L’informateur ajoute que l’opération était « de nature 100 % politique » et visait à espionner les dissidents chinois possédant un compte chez Google.
COREE DU NORD Vers une réunification ? En janvier 2010, un responsable sud-coréen rapporte aux Américains que « des officiels nord-coréens de rang élevé en poste à l’étranger ont récemment fait défection au profit de la Corée du Sud ». Le scénario le plus radical émane d’un vice-ministre sud-coréen qui confie, en février 2010, que « la Corée du Nord s’est déjà effondrée économiquement. Elle s’effondrera politiquement deux ou trois ans après la mort de Kim Jong-il. » La Chine, qui fait officiellement passer le message inverse, n’aurait pas une position monolithique. Selon le vice-ministre sud-coréen, certains officiels chinois « sont prêts à admettre (…) que les deux États devraient être réunifiés » sous les couleurs du Sud.
AFGHANISTAN Le clan Karzaï Les États-Unis estiment qu’il leur faut contrôler les agissements du patron politique de Kandahar, Ahmed Wali Karzaï (surnommé « AWK »), le demi-frère du président afghan Hamid Karzaï. « Bien que nous devions traiter avec “AWK” en tant que président du conseil provincial, il est considéré par beaucoup comme corrompu et impliqué dans le trafic de drogue », note un télégramme de novembre 2009. Au cœur de la stratégie du clan Karzaï figurerait l’appropriation de deux ressources clés, « les terres fertiles et l’eau », ainsi que sa volonté de faire main basse sur les compagnies de sécurité privées.
PAKISTAN Des soldats américains dans les zones tribales L’ambassadrice américaine à Islamabad fait état, en octobre 2009, d’un feu vert de l’état-major pakistanais à la présence de forces spéciales américaines (six hommes) dans les zones tribales. Le câble précise que c’est la seconde fois en deux mois que l’autorisation est fournie. Le nucléaire Barack Obama confie que le Pakistan est son « cauchemar privé », selon un télégramme. Islamabad supporte mal l ‘ obsession américaine visant à mettre son arsenal nucléaire sous tutelle. L’ambassadrice américaine évalue, en février 2009, le risque : « Notre principale inquiétude n’est pas qu’un groupe islamiste puisse subtiliser une bombe entière, mais plutôt qu’un individu travaillant au sein des installations gouvernementales fasse sortir suffisamment de matériel fissile pour fabriquer une bombe. »
IRAK L’ingérence de l’Iran Menaces et promesses, aide financière, manipulations politiques, espionnage tous azimuts, tentatives d’influence religieuse, fournitures d’armes et d’explosifs à des milices, incidents sporadiques plus ou moins provoqués sur les frontières communes : la stratégie iranienne en Irak a usé de tous les instruments possibles. C’est « le général Ghassem Soleimani, commandant des Gardiens de la révolution – Force Al-Qods (un proche du Guide suprême iranien, Ali Khamenei), qui dirige la formulation et la mise en œuvre de la politique irakienne du gouvernement d’Iran ».
YÉMEN Les raids américains Dans la lutte contre Al-Qaida pour la péninsule Arabique (AQPA), et contrairement à la thèse officielle selon laquelle les bombardements des bases présumées d’AQPA sont l’œuvre de l’armée yéménite, un télégramme relatant une rencontre entre le président yéménite, Ali Abdallah Saleh, et le général américain, David Petraeus, en janvier 2010, prouve que ces frappes sont l’œuvre de l’armée américaine. « Nous continuerons à dire qu’il s’agit de nos bombes et non des vôtres », assure le président.
ISRAËL Les ventes d’armes américaines aux pays arabes Une méfiance générale vis-à-vis des pays du Moyen-Orient, et qui ne se limite pas au programme nucléaire iranien, incite Israël à nourrir la revendication d’un avantage militaire qualitatif régional. Israël veille à ce que les pays arabes ne soient pas dotés d’armes susceptibles de l’inquiéter.
KENYA – SOUDAN Trafic d’armes et corruption Officiellement destinée à l’armée kényane, une importante cargaison de chars T 72 et d’armes découverte après l’arraisonnement, en septembre 2008, d’un navire par des pirates somaliens, a été livrée au Sud-Soudan en contravention avec l’accord de paix signé en 2005. Les Américains découvrent les liens entre les autorités kényanes et celles du Sud-Soudan. Un « haut responsable kényan », notent-ils, a pu tirer « un bénéfice financier » pour avoir facilité le transfert clandestin des chars et des armes achetés en Ukraine.
SÉNÉGAL Corruption et divisions à Dakar Les États-Unis considèrent le régime sénégalais du président Abdoulaye Wade comme « une démocratie faiblissante » gangrenée par « des scandales financiers ». Karim Wade, fils et dauphin probable du président, est surnommé « Monsieur 15 % »
MAGHREB Corruption en Tunisie et au Maroc Les diplomates américains dépeignent le régime « sclérosé » du président Ben Ali et « la corruption de la famille de la première dame », et pensent que « les pratiques de corruption se sont institutionnalisées » au Maroc sous le règne de Mohammed VI, visant le Palais royal et l’armée.
TURKMÉNISTAN Le paradis de Bouygues Frappé par la crise, le groupe français a relocalisé un nombre important d’employés au Turkménistan. La dictature d’Asie centrale est devenue pour Bouygues un véritable havre de prospérité, au point que Bouygues a la maîtrise presque exclusive de tous les chantiers prestigieux. Les diplomates américains s’interrogent sur les dessous de cette situation privilégiée, dans un pays opaque et corrompu, soulignant que certains bâtiments monumentaux demeurent, une fois livrés, quasiment inoccupés.
ÉTATS-UNIS Espionnage Une directive secrète de 2009 indique les consignes de Washington à ses diplomates en matière d’espionnage. Un mémo adressé à la mission à l’ONU, à New York, réclame des diplomates qu’ils fournissent « toute information biographique et biométrique » sur leurs interlocuteurs, y compris leurs alliés : informations personnelles telles que « numéros de cartes de crédit ; numéros de cartes de fidélité de compagnies aériennes », et biométriques telles que « empreintes digitales, photographies faciales, ADN et scanners de l’iris ».
GUANTANAMO « Laissez-les mourir ! » Lorsque Washington entreprend de chercher des pays d’accueil pour les détenus de Guantanamo, le ministre de l’intérieur du Koweït, cheikh Jaber Al-Khalid Al-Sabah, rétorque : « Laissez-les mourir ! S’ils sont pourris, ils sont pourris. Il vaut mieux s’en débarrasser. » Le roi saoudien Abdallah a pour sa part « une idée » : implanter sur les intéressés une puce électronique qui permettra de les pister.
FRANCE « Sarkozy l’Américain » Nicolas Sarkozy, qualifié de « président le plus proaméricain depuis la seconde guerre mondiale », fascine les diplomates américains. La candidature Le 1er août 2005, M. Sarkozy annonce aux diplomates américains sa candidature à la présidentielle française, seize mois avant de le dire aux Français. Lors de cette rencontre, « M. Sarkozy a exprimé son admiration pour le président Bush. Sarkozy a dit que, comme le président [Bush], lui aussi mettait un point d’honneur à tenir sa parole et à affronter honnêtement les problèmes réels du pays. » Le veto à l’ONU M. Sarkozy, alors ministre de l’intérieur, se déclare opposé à l’invasion américaine de l’Irak tout en critiquant la décision de Jacques Chirac et Dominique de Villepin d’utiliser le veto de la France au Conseil de sécurité de l’ONU, « affirmant que c’est quelque chose que lui “ne ferait jamais” ». La guerre en Irak En 2006, Nicolas Sarkozy indique, devant un ministre de George Bush, qu’il pourrait, s’il est élu président, envoyer l’armée française en Irak. « Sarkozy a déclaré, note un télégramme, que la France et la communauté internationale allaient devoir aider les États-Unis à résoudre la situation en Irak. Peut-être en remplaçant l’armée américaine par une force internationale. » L’OTAN Une fois Nicolas Sarkozy élu président, les diplomates américains suivent de près les dossiers de politique étrangère. Sur l’OTAN, ils en savent à une époque plus que les Français : « Les plus proches conseillers de Sarkozy ont été clairs sur le fait qu’il a déjà pris la décision de réintégrer la France dans le commandement militaire intégré. » L’Élysée a par ailleurs évoqué un retour de la force nucléaire française dans l’OTAN. Le 2 février 2010, le conseiller de l’Élysée pour les affaires stratégiques, François Richier, affirme que si les États-Unis cherchaient à diminuer le rôle des arsenaux nucléaires dans le concept stratégique de l’OTAN, cela « aurait un impact sur la capacité de la France à intégrer ses forces nucléaires dans l’OTAN ». Officiellement, la France a exclu de renoncer à l’autonomie totale de sa force de frappe. Les documents américains montrent que, dans le huis clos des discussions, Paris a envisagé un retour dans l’OTAN portant sur le nucléaire. La Turquie Les diplomates américains rapportent un épisode étonnant, dans un télégramme intitulé « Personne pour lui dire “non” », consacré à des conseillers de l’Élysée « qui évitent de contredire le président ou de provoquer son mécontentement » : « Ils ont détourné l’ avion du président pour éviter qu’il voie la tour Eiffel éclairée aux couleurs de la Turquie à l’occasion de la visite du premier ministre Erdogan (une décision prise par la Mairie de Paris). »
FRANCE – IRAN La mission secrète de l’Élysée Décrite comme « la pointe du glaive » des efforts pour endiguer le programme nucléaire iranien, la France a aussi tenté, quelques mois après l’arrivée au pouvoir de Nicolas Sarkozy, en 2007, une diplomatie secrète avec l’Iran. Les télégrammes révèlent une mission confidentielle à Téhéran, en août 2007, d’un émissaire de l’Elysée, François Richier, qui s’est entretenu avec Ali Akbar Velayati, le conseiller diplomatique du Guide suprême iranien, Ali Khamenei. La tentative a fait long feu, car « Velayati partait de l’idée erronée que M. Sarkozy libérerait la France de sa “dépendance” envers les Etats-Unis ». L’affaire Clotilde Reiss L’Élysée a délibérément exagéré le rôle joué par la Syrie dans les tractations pour faire sortir de prison la chercheuse française Clotilde Reiss, retenue en Iran de juillet 2009 à mai 2010 sur des accusations d’« espionnage ». Un télégramme d’août 2009 cite ainsi le conseiller de l’Élysée François Richier : « Bien sûr, nous ne savons pas si les Syriens ont fait quoi que ce soit, mais nous les avons remerciés quand même. » L’objectif, selon les Américains, est de « valider la politique de Nicolas Sarkozy d’ouverture à la Syrie ».
FRANCE-BRÉSIL Les transferts de technologie militaire Derrière la « lune de miel » entre Nicolas Sarkozy et le président brésilien Lula da Silva se cachent des transferts de technologie militaire française destinés à permettre au géant d’Amérique latine de se doter d’une base industrielle de défense. Les télégrammes révèlent que lors des négociations sur le projet de vente d’avions militaires Rafale, « les Français ont depuis le début garanti aux Brésiliens qu’ils livreraient les codes informatiques du Rafale ». M. Sarkozy a promis, dans une lettre à son homologue, « un transfert sans restrictions de renseignements technologiques ». Le Brésil, analysent les Américains, souhaite « produire le Rafale sur son territoire, et éventuellement le vendre à travers l’Amérique latine ».
OTAN–RUSSIE Le « plan balte » secret « Aigle gardien » est le nom des plans de défense que l’OTAN a décidé d’élaborer pour rassurer les trois États baltes qui se sentaient menacés après l’intervention militaire russe en Géorgie en août 2008. Les télégrammes dévoilent les dessous de cette négociation secrète entre alliés visant à doter les nouveaux membres de l’Alliance (entrés en 2004) d’un dispositif de protection renforcé. Les documents révèlent à quel point les alliés ont pris soin d’entourer ces plans d’une grande confidentialité. Ils sont entrés en vigueur début 2010.
RUSSIE Le FSB contre l’ambassade américaine À Moscou, les services secrets russes harcèlent les Américains. L’ambassade souligne à plusieurs reprises les opérations de déstabilisation et de harcèlement contre ses employés : menaces de mort, intrusions aux domiciles, montages photo compromettants… « Nous n’avons aucun doute que cette activité a pour origine le FSB », écrit l’ambassadeur en novembre 2009.
CHINE Les attaques contre Google En janvier 2010, Google annonce que ses serveurs ont été victimes de cyberattaques venant probablement de Chine. Un informateur chinois haut placé fait savoir à l’ambassade américaine que cette opération a été préparée et coordonnée au plus haut niveau « au sein du bureau d’information du Conseil d’État, sous la supervision de deux membres du comité permanent du Bureau politique ». L’informateur ajoute que l’opération était « de nature 100 % politique » et visait à espionner les dissidents chinois possédant un compte chez Google.
COREE DU NORD Vers une réunification ? En janvier 2010, un responsable sud-coréen rapporte aux Américains que « des officiels nord-coréens de rang élevé en poste à l’étranger ont récemment fait défection au profit de la Corée du Sud ». Le scénario le plus radical émane d’un vice-ministre sud-coréen qui confie, en février 2010, que « la Corée du Nord s’est déjà effondrée économiquement. Elle s’effondrera politiquement deux ou trois ans après la mort de Kim Jong-il. » La Chine, qui fait officiellement passer le message inverse, n’aurait pas une position monolithique. Selon le vice-ministre sud-coréen, certains officiels chinois « sont prêts à admettre (…) que les deux États devraient être réunifiés » sous les couleurs du Sud.
AFGHANISTAN Le clan Karzaï Les États-Unis estiment qu’il leur faut contrôler les agissements du patron politique de Kandahar, Ahmed Wali Karzaï (surnommé « AWK »), le demi-frère du président afghan Hamid Karzaï. « Bien que nous devions traiter avec “AWK” en tant que président du conseil provincial, il est considéré par beaucoup comme corrompu et impliqué dans le trafic de drogue », note un télégramme de novembre 2009. Au cœur de la stratégie du clan Karzaï figurerait l’appropriation de deux ressources clés, « les terres fertiles et l’eau », ainsi que sa volonté de faire main basse sur les compagnies de sécurité privées.
PAKISTAN Des soldats américains dans les zones tribales L’ambassadrice américaine à Islamabad fait état, en octobre 2009, d’un feu vert de l’état-major pakistanais à la présence de forces spéciales américaines (six hommes) dans les zones tribales. Le câble précise que c’est la seconde fois en deux mois que l’autorisation est fournie. Le nucléaire Barack Obama confie que le Pakistan est son « cauchemar privé », selon un télégramme. Islamabad supporte mal l ‘ obsession américaine visant à mettre son arsenal nucléaire sous tutelle. L’ambassadrice américaine évalue, en février 2009, le risque : « Notre principale inquiétude n’est pas qu’un groupe islamiste puisse subtiliser une bombe entière, mais plutôt qu’un individu travaillant au sein des installations gouvernementales fasse sortir suffisamment de matériel fissile pour fabriquer une bombe. »
IRAK L’ingérence de l’Iran Menaces et promesses, aide financière, manipulations politiques, espionnage tous azimuts, tentatives d’influence religieuse, fournitures d’armes et d’explosifs à des milices, incidents sporadiques plus ou moins provoqués sur les frontières communes : la stratégie iranienne en Irak a usé de tous les instruments possibles. C’est « le général Ghassem Soleimani, commandant des Gardiens de la révolution – Force Al-Qods (un proche du Guide suprême iranien, Ali Khamenei), qui dirige la formulation et la mise en œuvre de la politique irakienne du gouvernement d’Iran ».
YÉMEN Les raids américains Dans la lutte contre Al-Qaida pour la péninsule Arabique (AQPA), et contrairement à la thèse officielle selon laquelle les bombardements des bases présumées d’AQPA sont l’œuvre de l’armée yéménite, un télégramme relatant une rencontre entre le président yéménite, Ali Abdallah Saleh, et le général américain, David Petraeus, en janvier 2010, prouve que ces frappes sont l’œuvre de l’armée américaine. « Nous continuerons à dire qu’il s’agit de nos bombes et non des vôtres », assure le président.
ISRAËL Les ventes d’armes américaines aux pays arabes Une méfiance générale vis-à-vis des pays du Moyen-Orient, et qui ne se limite pas au programme nucléaire iranien, incite Israël à nourrir la revendication d’un avantage militaire qualitatif régional. Israël veille à ce que les pays arabes ne soient pas dotés d’armes susceptibles de l’inquiéter.
KENYA – SOUDAN Trafic d’armes et corruption Officiellement destinée à l’armée kényane, une importante cargaison de chars T 72 et d’armes découverte après l’arraisonnement, en septembre 2008, d’un navire par des pirates somaliens, a été livrée au Sud-Soudan en contravention avec l’accord de paix signé en 2005. Les Américains découvrent les liens entre les autorités kényanes et celles du Sud-Soudan. Un « haut responsable kényan », notent-ils, a pu tirer « un bénéfice financier » pour avoir facilité le transfert clandestin des chars et des armes achetés en Ukraine.
SÉNÉGAL Corruption et divisions à Dakar Les États-Unis considèrent le régime sénégalais du président Abdoulaye Wade comme « une démocratie faiblissante » gangrenée par « des scandales financiers ». Karim Wade, fils et dauphin probable du président, est surnommé « Monsieur 15 % »
MAGHREB Corruption en Tunisie et au Maroc Les diplomates américains dépeignent le régime « sclérosé » du président Ben Ali et « la corruption de la famille de la première dame », et pensent que « les pratiques de corruption se sont institutionnalisées » au Maroc sous le règne de Mohammed VI, visant le Palais royal et l’armée.
TURKMÉNISTAN Le paradis de Bouygues Frappé par la crise, le groupe français a relocalisé un nombre important d’employés au Turkménistan. La dictature d’Asie centrale est devenue pour Bouygues un véritable havre de prospérité, au point que Bouygues a la maîtrise presque exclusive de tous les chantiers prestigieux. Les diplomates américains s’interrogent sur les dessous de cette situation privilégiée, dans un pays opaque et corrompu, soulignant que certains bâtiments monumentaux demeurent, une fois livrés, quasiment inoccupés.
1. Article paru dans Le Monde du Samedi 25 décembre 2010, « WikiLeaks Décryptages », p. 15. Cf. également dans Le Monde.fr l'article du 29 novembre sur le même sujet.
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Commentaire(s)
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En réponse à Interesting information about activation par Polit'producteur (non vérifié)
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