- lun, 2012-03-12 00:28
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À l’intention de l’opinion publique internationale
Il y a un complot international dont le but est d’achever la destruction de mon pays. Cela a commencé en 1975 et la cible était la civilisation néohellénique, cela a continué avec la falsification de notre histoire contemporaine et de notre identité nationale et maintenant on essaie de nous faire aussi disparaitre biologiquement à travers le chômage, la famine et la paupérisation. Si le peuple grec ne se soulève pas dans son ensemble pour les en empêcher, le danger de voir disparaître la Grèce existe. Je situe cela dans les dix ans à venir. De nous, il ne restera que la mémoire de notre civilisation et de nos luttes pour la liberté.
Jusqu’en 2009, il n’y avait pas de problème économique sérieux. Les grandes plaies de notre économie étaient les dépenses exagérées pour les achats d’armes et la corruption d’une partie du monde de la politique, des finances et du journalisme. Mais pour ces deux plaies, les étrangers étaient coresponsables. C’était le cas des Allemands, des Français, des Anglais et des Américains, qui gagnaient des milliards d’euros au détriment de notre richesse nationale par la vente annuelle d’armes. Cette hémorragie continuelle, nous mettait à genoux et ne nous permettait pas d’aller de l’avant tout en enrichissant les nations étrangères. La même chose se passait avec le problème de la corruption. Par ex. la société allemande Siemens avait une branche spécifique pour « acheter » les Grecs influents, afin qu’elle puisse placer ses produits dans le marché grec. En conséquence, le peuple grec a été la victime de ce duo de voleurs, Grecs et Allemands, qui s’enrichissaient sur son dos.
Il est évident que ces deux grandes plaies auraient pu être évitées, si les leaders des deux partis politiques pro-américains alternativement au pouvoir n’avaient pas été noyautés par des éléments corrompus, qui pour camoufler la fuite des richesses (qui étaient le produit du travail du peuple grec) vers les caisses des pays étrangers, avaient recours à des emprunts exorbitants, avec comme résultat une dette publique de 300 milliards d’euros, c’est-à-dire au 130% du PNB. Avec cette combine les étrangers que j’ai mentionnés auparavant gagnaient sur deux plans. Premièrement avec la vente de leurs armes et de leurs produits. Et deuxièmement, avec les intérêts des sommes qu’ils prêtaient aux gouvernements mais pas au peuple. Car, comme on vient de le voir, le peuple était la victime principale dans les deux cas. Un seul exemple vous convaincra. Les intérêts du prêt d’un milliard de dollars que Andréas Papandréou avait demandé en 1986 à un grand pays européen, ont atteint la somme de 54 milliards d’euros et n’ont été remboursés qu’….en 2010 !
Monsieur Junker a déclaré il y a un an qu’il avait constaté en Grèce une grande hémorragie due aux dépenses exagérées (et obligatoires) en vue de l’achat des armes à l’Allemagne et à la France spécifiquement. Et il a conclu que de cette manière nos vendeurs nous conduisent à une catastrophe certaine. Cependant, il avoue qu’il n’a rien fait afin de ne pas nuire aux intérêts de ses pays amis !
En 2008, la grande crise économique sévissait en Europe. Il était donc logique que l’économie grecque soit également touchée. Pourtant, le niveau de vie, assez élevé pour qu’on soit classé parmi les 30 pays les plus riches au monde, était en principe resté le même. Il y a eu par contre une augmentation de la dette publique. Mais la dette publique ne conduit pas obligatoirement à une crise économique. Les dettes des grands pays, tel que les Etats-Unis et l’Allemagne représentent des billions d’euros. La question est s’il y a ou non un développement économique et de la production. Dans ce cas, on peut emprunter auprès des grandes Banques avec un taux jusqu’à 5%, jusqu’à ce que la crise passe.
Nous étions exactement dans ce cas en novembre 2009, quand il y a eu un changement de gouvernement et que G. Papandréou est devenu Premier Ministre. Pour que ce soit clair ce que le peuple grec pense aujourd’hui de sa politique catastrophique, je donne deux chiffres : aux élections de 2009, le PASOK a obtenu le 44% des votes. Aujourd’hui, les sondages, ne lui accordent que 6%.
M. Papandréou aurait pu affronter la crise économique (qui, comme je viens de le dire, reflétait la crise européenne) en empruntant de l’argent auprès des Banques étrangères avec le taux habituel c’est-à-dire au dessous de 5%. S’il l’avait fait, il n’y aurait pas eu pour notre pays le moindre problème. Exactement le contraire se serait passé, car nous nous trouvions dans une phase de développement économique et ainsi notre niveau de vie aurait sûrement augmenté.
Mais M. Papandreou avait déjà mis en place son complot contre le peuple grec l’été 2009, quand il a rencontré en cachette Strauss-Kahn, afin que la Grèce soit conduite sous la coupe du FMI. L’information concernant cette rencontre a été donnée par l’ex-Président du FMI lui-même.
Mais pour en arriver là, la situation économique réelle de notre pays devait être altérée, afin que les Banques étrangères prennent peur et augmentent les intérêts à des taux prohibitifs. Cette opération trafiquée a commencé par la montée en flèche mensongère du Déficit Public de 9,2% à 15%. Pour cet acte criminel, le Procureur M. Peponis a renvoyé il y a 20 jours devant la Justice M. Papandréou et M. Papakonstantinou (ex-Ministre des Finances).
Puis, a suivi la campagne méthodique de M. Papandréou et de l’ex-Ministre des Finances en Europe, qui a duré 5 mois et pendant laquelle ils essayaient de convaincre les étrangers que la Grèce est un Titanique prêt à couler, que les Grecs sont corrompus et paresseux et par conséquent, incapables de répondre aux besoins du pays. A chacune de leurs déclarations les taux d’intérêt augmentaient de manière à ce que nous ne puissions plus emprunter et qu’ainsi notre subordination au FMI et à la Banque Centrale Européenne prenne la forme d’un sauvetage, alors qu’en réalité c’était le commencement de notre mort.
En Mai 2010, le fameux ‘Mémorandum’ (« Mnimonio ») – Plan d’Austérité – c’est-à-dire notre soumission totale à nos créanciers, a été signé par un seul Ministre. La législation grecque dans des cas similaires, exige qu’un accord aussi important soit voté par les 3/5 du Parlement. Par conséquent, en réalité le « Mnimonio » et la Troïka qui nous gouvernent aujourd’hui, agissent illégalement non seulement selon la législation grecque mais aussi selon la législation européenne.
Depuis lors, si les marches qui conduisent à notre mort sont au nombre de vingt, nous en avons déjà descendu plus de la moitié. Imaginez qu’avec ce « Mnimonio » nous cédons aux étrangers notre Indépendance Nationale et nos biens publics. C’est-à-dire, les Ports, les Aéroports, les Réseaux Routiers, la compagnie d’Électricité, celle de l’eau, les richesses souterraines et sous-marines etc. Et même nos monuments historiques comme l’Acropole, Delphes, Olympie, Epidaure etc., puisque nous avons renoncé à toutes contestations relatives.
La production s’est arrêtée, le chômage a atteint 18%, 80000 magasins ont fermés, des milliers de petites entreprises et des centaines d’industries. Au total, 432000 entreprises ont mis la clef sous la porte. Des dizaines de milliers de jeunes diplômés quittent le pays qui chaque jour sombre plus profondément dans une obscurité moyenâgeuse. Des milliers de citoyens –ex-aisés, cherchent la nourriture dans les poubelles et dorment sur les trottoirs.
Et pourtant, nous vivons soi-disant grâce à la générosité de nos créanciers, de l’Europe, des Banques et du FMI. En réalité, chaque paquet de ces dizaines de milliards d’euros pour lesquels la Grèce s’endette, est renvoyé dans sa totalité d’où il vient, alors que nous supportons le poids de nouveaux taux intolérables. Et comme il est nécessaire de conserver l’Etat, les Hôpitaux et les Ecoles, la Troïka charge les classes moyennes et inférieures de la société d’impôts démesurés qui conduisent directement à la famine. Nous avons subit une famine générale au début de l’occupation allemande en 1941 avec 300000 morts en six mois. Et voilà que le spectre de la famine revient dans notre pays diffamé et malheureux.
Si l’on pense que l’occupation allemande nous a coûté un million de morts et la destruction totale du pays, comment est-il possible que nous, les Grecs, nous acceptions les menaces de Mme Merkel et l’intention des Allemands de nous imposer un nouveau gauleiter. Cette fois portant une cravate…
Et pour prouver à quel point la Grèce est un pays riche et à quel point le peuple Grec est travailleur et consciencieux (conscience du Devoir envers la Liberté et l’amour pour la patrie) il faut se référer à la période de l’Occupation Allemande de 1941 jusqu’en octobre 1944. Quand les SS et la famine tuaient un million de citoyens et la Wehrmacht détruisait systématiquement le pays, volait la production agricole et l’or des Banques, les Grecs ont sauvé le Peuple de la famine en créant un Mouvement de Solidarité Nationale et une armée de 100000 partisans qui a immobilisé 20 divisions allemandes dans notre pays.
En même temps, les Grecs non seulement ont réussi à survivre grâce à leur cœur au labeur mais un grand développement de l’art néohellénique a eu lieu, sous l’Occupation, spécialement dans les domaines de la littérature et de la musique. La Grèce a choisi la voie du sacrifice pour la liberté et en même temps celle de la survie.
À ce moment là, aussi, ils nous avaient attaqués sans aucune raison et nous avions répondu par la Solidarité et la Résistance et, nous avons survécu. Nous faisons exactement la même chose maintenant, certains que le vainqueur final sera le peuple grec. C’est ce message que j’envoie à Mme Merkel et à M. Schäuble en déclarant que je reste toujours ami du Peuple Allemand et admirateur de sa grande contribution à la Science, la Philosophie, l’Art et spécialement la Musique ! Et peut-être la meilleure preuve de ceci est le fait que j’ai confié l’ensemble de mon œuvre musicale à deux Editeurs Allemands, Schott et Breitkopf qui sont parmi les plus grands éditeurs au monde ; ma collaboration avec eux est tout à fait amicale.
Ils menacent de nous expulser de l’Europe. Si l’Europe ne veut pas de nous une fois, nous, cette Europe des Merkel et Sarkozi nous ne la voulons pas dix fois.
Aujourd’hui Dimanche 12 Février, je me prépare moi aussi à participer avec Manolis Glezos à la grande manifestation contre le vote du « Mémorandum 2 » ; Manolis Glezos, est le héros qui a descendu la Svastika de l’Acropole en donnant ainsi le signal non seulement au début de la Résistance Grecque mais aussi à celui de la Résistance Européenne contre Hitler. Nos rues et nos places vont être inondées de centaines de milliers de citoyens qui manifesteront leur rage contre le gouvernement et la Troïka.
J’ai écouté hier le Premier Ministre-Banquier dire dans sa déclaration destinée au Peuple Grec que « nous sommes presque arrivés au point zéro ». Qui sait ceux qui nous ont menés en deux ans au point ZERO ? Les mêmes qui, au lieu d’être en prison, ils menacent les députés pour qu’ils signent le Nouveau Mémorandum qui sera pire que le premier et qui sera appliqué par les mêmes personnes et avec les mêmes méthodes qui nous ont mené au point ZERO. Pourquoi ? Parce que ceci est imposé par le FMI et l’Euro-groupe qui exercent un chantage en disant que si nous n’obéissons pas, nous courons à la faillite. C’est le théâtre de l’absurde. Tous ces cercles qui fondamentalement nous haïssent (étrangers et Grecs) et qui sont les seuls responsables de la situation dramatique où ils ont conduit le pays, nous menacent, exercent un chantage avec comme but de continuer leur œuvre destructrice, c’est-à- dire de nous emmener au dessous du point ZERO jusqu’à notre disparition définitive.
Nous avons survécu dans des conditions très difficiles durant les siècles et il est certain que même s’ils nous mènent par la violence à l’avant-dernière marche avant la mort, les Grecs non seulement survivront mais renaîtront aussi. En ce moment je consacre toutes mes forces à la tentative d’unir avec énergie le peuple grec. Je tente de le convaincre que la Troïka et le FMI ne sont pas l’unique voie. Qu’il y a aussi une autre solution. Et celle-ci se résume à changer radicalement de cap et à se tourner vers la Russie pour une collaboration économique et pour la création d’associations qui nous aideront à révéler la richesse naturelle du pays à des conditions qui garantiront notre intérêt national. Quant à l’Europe, je propose de cesser d’acheter des armes à l’Allemagne et à la France. Et que nous fassions tout ce qui est possible, pour que l’Allemagne nous verse les indemnisations de guerre qu’elle nous doit et qui, à l’heure actuelle, peuvent atteindre, avec les intérêts, 500 milliards d’euros.
L’unique force qui peut réaliser ces changements révolutionnaires est le peuple grec uni dans un énorme Mouvement de Résistance et de Solidarité pour que la Troïka (FMI et Banques Européennes) soit chassée du pays. Alors que parallèlement, toutes leurs actions illégales devront être considérées comme caduques (prêts, intérêts, taxes, achats des biens publiques). Bien sûr, leurs collaborateurs grecs qui sont déjà condamnés dans la conscience du peuple en tant que traitres, devront être punis.
Je suis totalement dévoué à ce but (l’union du Peuple en un seul Mouvement) et je crois qu’à la fin on me rendra justice. J’ai lutté les armes à la main contre l’Occupation Hitlérienne. Jai connu les cachots de la Gestapo. J’ai été condamné à mort par les Allemands et j’ai survécu par miracle. En 1967 j’ai créé le Mouvement Panhellénique de Résistance, la première organisation de résistance contre la junte militaire. J’ai lutté dans la clandestinité. J’ai été arrêté et emprisonné à « l’abattoir » au Siège de la Police de la Junte. Et finalement, j’ai encore survécu.
Aujourd’hui, j’ai 87 ans et il est très probable que je ne connaisse pas le sauvetage de mon cher pays. Mais je mourrai, la conscience tranquille, car je continue à faire mon Devoir envers les idéaux de Liberté et de Justice, et cela je le ferai jusqu’à la fin.
Athènes,
12.2.2012
Mikis Theodorakis
Traduction en français : Dr. Kalliopi Stiga
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Commentaire(s)
Sauvons le peuple grec de ses sauveurs !
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Au moment où un jeune Grec sur deux est au chômage, où 25 000 SDF errent dans les rues d’Athènes, où 30% de la population est tombée sous le seuil de pauvreté, où des milliers de familles sont obligées de placer leurs enfants pour qu’ils ne crèvent pas de faim et de froid, où nouveaux pauvres et réfugiés se disputent les poubelles dans les décharges publiques, les « sauveurs » de la Grèce, sous prétexte que les Grecs « ne font pas assez d’efforts », imposent un nouveau plan d’aide qui double la dose létale administrée. Un plan qui abolit le droit du travail, et qui réduit les pauvres à l’extrême misère, tout en faisant disparaître du tableau les classes moyennes.
Le but ne saurait être le « sauvetage » de la Grèce : sur ce point, tous les économistes dignes de ce nom sont d’accord. Il s’agit de gagner du temps pour sauver les créanciers tout en menant le pays à une faillite différée. Il s’agit surtout de faire de la Grèce, avec la collaboration active de sa propre classe dirigeante, le laboratoire d’un changement social qui, dans un deuxième temps, se généralisera à toute l’Europe. Le modèle expérimenté sur les Grecs est celui d’une société sans services publics, où les écoles, les hôpitaux et les dispensaires tombent en ruine, où la santé devient le privilège des riches, où les populations vulnérables sont vouées à une élimination programmée, tandis que ceux qui travaillent encore sont condamnés aux formes extrêmes de la paupérisation et de la précarisation.
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