Suicide de Nathalie Filippi : les accusations de ses proches et les contre-feux des institutions

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  • ven, 2013-05-17 22:46
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Le cri, bronze moderne de Raphaelle Zecchiero

« Moi si j'ai rompu le silence
C'est pour éviter l'asphyxie
Oui je suis un cri de défense
Un cri qu'on pousse à la folie
Moi je suis un cri qu'on abrège
Je suis la détresse infinie ». Je ne suis qu'un cri (Jean Ferrat, Guy Thomas)

 

Le mardi 14 mai, la Une de Nice-Matin avait pour titre: Après le suicide d’une enseignante de la Trinité, le «J’accuse» de la famille. Le quotidien s’ouvrait ensuite sur une double page traversée par le titre: Le suicide de Nathalie suscite la polémique. Et c’était en page 3 – alors que la page 2 était consacrée aux réactions émues ou timidement réprobatives recueillies au cours de la marche organisée la veille à la mémoire du professeur décédée – que l’on pouvait lire, sous la seconde moitié du titre courant («suscite la polémique»), les accusations de Serge Baillod et François Filippi. Les voici :

Les obsèques de Nathalie auront lieu demain à 14h 30 au crématorium de Nice [Elles seront finalement reportées suite à une demande d'autopsie - Note de Politproductions]. Le temps du deuil, de la douleur n’est pas près de se refermer pour François Filippi et Serge Baillod, le père et le compagnon de Nathalie. Pas plus que le temps du pardon, du moins si le calvaire de la jeune enseignante devait être... vain. «Je vais engager une action en justice. Ça ne nous rendra pas Nathalie, ni à son fils de 15 ans, ni à sa famille, ni à moi. Je ne cherche pas à me venger de qui que ce soit. De cette plainte, je n’attends qu’une seule chose: qu’elle permette de rompre l’omerta scolaire, afin quil ny ait plus jamais, jamais, jamais d’autre Nathalie Filippi.»

Nice-Matin : Omerta, le mot est tout à la fois galvaudé et terrible?

Serge Baillod : C’est pourtant la terrible vérité... Parce que le pire pour la direction d’un collège ou d’un lycée, c’est que l’on fasse des vagues. Les «vagues», ça signifie des plans de carrière contrariés... Alors, même lorsqu’on est confronté au pire à l’intérieur d’un établissement scolaire, le mot d’ordre secret, voire tacite, c’est: «Faisons comme si tout était pour le mieux». En clair, «Sauvons la face!».

Nathalie dénonçait-elle cela ?

Non, mais elle le vivait. Comme tous les profs, elle savait pertinemment qu’il y a toujours trois ou quatre cas difficiles dans une classede 25 ou 30...

On laisse entendre qu’elle avait des problèmes de discipline?

Qui n’en aurait pas eu avec notamment certains élèves. Des voyous connus de tous, pour leur violence au sein de leur famille. Certains ont eu tout récemment maille à partir avec la justice et la police pour des faits d’agression... Nathalie tentait de faire avec.

Elle était devenue leur bouc-émissaire?

Non, pas plus que ses collègues qui, eux aussi, n’avaient pas d’autre solution que d’accepter cette ambiance lourde. Mais elle était amoureuse de son métier. Elle brûlait non seulement de transmettre son savoir, mais de le faire en suscitant l’enthousiasme de ses éleves. Alors, comme le font tous les profs, elle avait tenté d’isoler les voyous, en passant un marché avec eux: «Vous faites ce que vous voulez, mais ne perturbez plus la classe».

En vain, manifestement?

Oui. C’était des insultes incessantes. Des rots ou des pets tonitruants en plein cours. Des provocations physiques. Des hurlements un jour, le lendemain, ils chantaient à tue-tête dans la classe. Autant de dérives qu’elle avait signalées à sa hiérarchie. En vain et donc contrainte de les accepter dans ses cours. Au point que, depuis quelques semaines, elle tenait, à la demande de son délégué syndical, un carnet de bord précis de ces «agressions» dans sa classe.

Vous accusez ces élèves ?

Non, au final, les voyous ont peut-être «tué» Nathalie... Mais pas tous seuls. J’accuse le système aussi. La semaine dernière, l’un de ces voyous a franchi un cap. Il s’est emparé d’une chaise, l’a brandie avant de la jeter à travers la fenêtre... Personne ne pouvait plus faire comme si de rien n’était. Il fallait intervenir. Et là, Nathalie a subi un premier choc. Quelques minutes après l’incident, quand sa hiérarchie est venue dans la classe, ce fut non pas pour la soutenir, mais pour l’humilier devant ses élèves. Le voyou avait gagné quand Nathalie s’est vue reprocher devant les enfants ahuris d’être «une incapable!», pire «de mettre en danger ses élèves».

C’est là qu’elle bascule?

Non, ça lui fait mal, mais elle est forte. C’est le mardi suivant que je la trouve en pleurs, effondrée à son retour du collège. Naïvement sans doute, elle s’attendait à être soutenue par sa hiérarchie. Au lieu de lui envoyer un inspecteur de police pour l’aider à faire entendre raison à ces énergumènes, on lui annonçait qu’un inspecteur d’académie allait venir dans sa classe, qu’il était chargé d’évaluer son travail, ses compétences. De victime, l’Education nationale la transformait en coupable. «Ils m’ont collé une inspection, je n’irai plus au collège, je démissionne». Je l’entends encore et encore cette phrase qui l’a conduite au pire. La suite, vous la connaissez...

Cet établissement ne l’a-t-il pas aidée en envoyant du secours chez elle, mercredi?

François Filippi : Ils lui ont envoyé la police et les pompiers, elle ne leur a pas ouvert mais leur a parlé à travers la porte. À sa voix, ils ont bien entendu que tout allait bien. Mais elle l’a mal vécu, se sentant, encore une fois, considérée comme une personne malade.

Polémos est incontestablement le bon mot pour désigner l’engagement de Serge Baillod et François Filippi qui, selon l’édition de dimanche du même journal, souhaitent «se battre pour que cela n’arrive plus jamais». Et dans le numéro du 14 mai leurs accusations sont fortes et franches: «les voyous ont peut-être “tué” Nathalie... Mais pas tous seuls. J’accuse le système aussi». Toutefois, « polémique » dit autre chose que ce légitime combat. Il dénote la controverse agitée et passionnelle des opinions.

Et en effet, page 2 et page 3 figurent deux encadrés sur fond rose qui viennent encadrer les déclarations dures et drues du père et de l’ami, pour les ramener à une simple «polémique» condamnée à retomber et, peut-être, pour éviter qu’elles n’en suscitent d’autres, voire, on ne sait jamais, que de proche en proche, et avec la fulgurance des réseaux sociaux, le million de fonctionnaires de l’Education nationale ne libère soudain sa parole.

Le premier encadré rapporte les propos du SNES-FSU dans lesquels la vérité joue l’arlésienne. Dans une superbe langue de bois, Richard Ghis, le secrétaire académique de ce syndicat, met en balance de possibles «ressentis» et de possibles «éléments avérés». Il invoque prudemment l’enquête administrative demandée par le SNES et il s’abstient, lui, de toute mise en accusation. Enfin, à la question évidemment stratégique, posée ici sur le mode de l’irréel, de savoir si le «geste» de Nathalie Filippi «pourrait» être «symptomatique d’un malaise plus général, dans la profession», le syndicaliste répond que, certes, les conditions du travail des enseignants ne sont pas «faciles», que les classes sont «surchargées», mais que «pour autant, et heureusement, toute la profession n’est pas dans une telle situation de détresse. Il ne faut pas faire d’amalgame». La réponse est exprimée dans le registre de la particularité et de la pathologie («c'est la première fois que ça arrive dans l'académie de Nice. L'enseignante était-elle fragile, avait-elle des soucis autres que professionnels?»), précisément celui que dénonce le père de Nathalie Filippi : «elle l’a mal vécu [l’envoi chez elle par son établissement de la police et des pompiers], se sentant, encore une fois, considérée comme une personne malade». Que Nathalie se soit trouvée dans une situation de détresse, c’est incontestable, mais s’il est impossible à Richard Ghis de juger si cette situation s’explique davantage par de possibles «ressentis» que par de possibles «éléments avérés» (formule au demeurant obscure), comment peut-il soutenir qu'elle n’est pas générale ? Il le peut parce le syndicat prétend n’avoir eu qu’un «écho» des difficultés professionnelles de Nathalie Filippi. Mais quand bien même il le faudrait admettre dans le cas particulier de cette enseignante, ce qui est bien difficile étant donné l’ampleur de ses difficultés, il a eu, lui comme tous les autres enseignants, des centaines, des milliers d’échos étouffés de cas semblables, je veux dire d’élèves, de cours, d’enseignements impossibles, de hiérarchies sourdes, sous pression et oppressives, et de professeurs excédés, dépassés, usés, effondrés, déprimés, désespérés. Et si Nathalie Filippi a fini par ne plus «tolérer» cet échec au point de s'en prendre fatalement à elle-même, c’est peut-être que, comme le dit son compagnon, «elle était amoureuse de son métier, [qu’]elle brûlait non seulement de transmettre son savoir, mais de le faire en suscitant l’enthousiasme de ses élèves», que si pathos il y avait en elle il était ce feu sacré que l’on saluait autrefois chez les meilleurs d’entre les professeurs, attitrés ou non, que chez celles et ceux qui vivent ainsi passionnément leur métier la déception d'être empêchés de l’exercer peut être mortelle, tandis que les autres, quelle que soit leur conscience professionnelle, font en général le dos rond ou font «semblant», mais que tous, chacun à sa façon, souffrent d’un malaise qui n’a rien à voir avec la pathologie et tout à voir avec les conditions objectives de leur activité professionnelle.

Quant au second encadré, il est occupé par les déclarations de Philippe Jourdan, directeur académique des Alpes-Maritimes. Il n’y va pas de main morte. Après la compassion, et là encore à grand renfort de médicalisation, de psychologisation et de singularisation, il réfute les accusations des «proches de la victime». «Victime» de quoi donc déjà ? «Elle n’était pas bien. Un malaise que l’on a du mal à cerner et expliquer et dont s’était aperçue l’équipe de direction du collège. Elle lui a proposé de l’aider. Par un accompagnement et un soutien pédagogique qu’elle a refusés.», etc. etc.

Le silence dont a été et continue d’être victime Nathalie se refermera-t-il sur son destin ou bien son père et son compagnon parviendront-ils à secouer la conscience collective pour lui faire reconnaître la vérité que ce silence recèle? Tout dépendra du courage des membres de la communauté éducative. Il en va toujours ainsi avec la loi du silence.

Il y a bien, dans le même numéro de Nice-Matin, un exemple de cette parole qui devrait se libérer en mémoire de Nathalie, de Lise et de tant d’autres dont le «système» a pris la vie:

« En faire baver à un prof ! » : Annick l’a vécu

Jeune retraitée de l’Éducation nationale, Annick veut rendre hommage à Nathalie. «Elle était des nôtres!». Ce que la jeune enseignante de La Trinité a vécu, Annick l’a frolé: «J’ai débuté en 1973 et terminé en 2011. Que de changements en cours de route! Depuis les années 2000, je vivais en sursis, moi aussi. Mais il fallait tenir, tenir!»

Pourquoi les difficultés deviennent-elles insurmontables à un moment donné? « Il y a dix ans ce n’était pas ainsi. Jamais un groupe d’élèves n’aurait osé, sciemment, s’allier pour en faire baver à un prof.» Un groupe d’élèves harceleurs avec un, deux meneurs et des suiveurs qui, par faiblesse ou lâcheté, sont solidaires: Annick certifie que c’est désormais la règle dans certains établissements. «Le problème, c’est que prof harcelé, lui, il est toujours souvent seul. Pire, il est mal venu de l’aider. Les collègues font l’autruche: par indifférence, pour se protéger ou paraître invulnérables... Le mur s’élève alors quand le proviseur ou le principal utilise son pouvoir pour utiliser les profs harcelés comme s’ils étaient devenus indésirables parce que vulnérables.»

Annick raconte l’angoisse qui étreint alors les jeunes enseignants; terrorisés par l’épée de Damoclès de la «note administrative qui peut prendre des allures arbitraires». Elle évoque la lassitude fataliste des «anciens»: «Usés, blasés devant la dégradation des conditions morales de travail, ils se mettent en roue libre, attendent la retraite comme une libération.» Elle s’emporte finalement. Parle de «non-assistance à personne en danger»: «Après un drame comme celui de Nathalie, je vous assure que personne, personne n’osera vous dire qu’il ne savait pas.»

Mais si ce témoignage va dans le bon sens, il tend encore, dans l’esprit général du papier, à subjectiviser le problème, en focalisant sa critique sur «la dégradation des conditions morales de travail», en taisant les conditions objectives et matérielles de l'effondrement de l’Ecole, les réformes imbéciles et destructrices qui n'appellent qu'une seule réponse digne du geste de Nathalie : « Stop it ! »...

Lire aussi sur Politproductions : Une enseignante se suicide près de Nice ; Trois messages pour Lise, professeure martyre

Commentaire(s)

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 Les profs non-titulaires sont traités comme de véritables vassaux car leur ré-embauche dépend du principal(e).

Ce genre d'inspection diligentée par le principal est nommée par les non-titulaires une inspection "couperet" et sa finalité est le licenciement ou la non ré-embauche à la rentrée prochaine. De toute manière ils commencent tous à dire que c'est dû à sa fragilité. Même les syndicats sont, dans ce cas, odieux et lamentables. Pensez qu'ils ne demandent qu'une enquête administrative, pour un suicide accompagné de suspicion de harcèlement moral (suspicion pour les gens qui ne sont pas non-titulaires de l'éducation). Déjà qu'ils sont inutiles, ils couvrent tous les dysfonctionnements des rectorats et du ministère de l'éducation en ce qui concerne le traitement réservé aux profs non-titulaires.

Pour enfoncer encore le clou, cette année ils ont inventé un concours "réservé" complètement débile, sans formation ni renseignement. L'état demande à ces gens de prouver encore leurs compétences pour les titulariser alors qu'ils enseignent depuis plus de 10 ans pour certains. Ils ont tous été inspectés et reconduits d'année en année...... De toute façon si ces "pauvres" profs (1400 euros après 10 ans d'ancienneté) ratent ce pseudo-concours, ils seront devant les élèves en septembre. Ils ne sont pas assez compétents pour être titularisés et ainsi accéder à des conditions de travail et aux droits qui devraient être les leurs, mais ils sont assez compétents pour exercer le même métier mais pour un salaire de misère et dans des conditions similaires au servage: chantage à l'embauche, "voeux de silence", exécuter des tâches qui ne dépendent pas de leur fonction sans pouvoir se plaindre (conseil des syndicats), menace à l'inspection couperet, etc……).

J'ai été témoin d'une réunion (10 profs dont des non-titulaires) où la principale de collège a carrément dit qu'elle en avait marre des non-titulaires parce qu'ils étaient mutés chaque année. Et eux donc ! Ils ne savent pas une semaine avant la rentrée où ils vont atterrir (CDD; CDI) et si ils vont atterrir car la ré-embauche des non-titulaires en CDD n'est pas systématique et ils peuvent se retrouver sans emploi. Ces profs en CDD ne peuvent pas prendre un crédit de plus de un an!

Le recteur parle d'une "visite conseil". C'est lamentable car tous les profs savent pertinemment (car c'est fréquent) que cette inspection n'avait pour but que de se débarrasser d'elle car elle ne devait pas convenir au "petit" chef qui dirige ce bahut et qui est incapable de régler les problèmes de discipline au sein de son établissement. Ces gens ont vite fait de trouver un autre responsable qu'eux à leurs incompétences.

L'INSPECTION. Je connais un IPR (inspecteur) qui n'a enseigné que deux ans avant d'être inspecteur. Il trouve tout à fait normal de critiquer et d'enfoncer des profs précaires ou non qui enseignent depuis plus de 10 ans. Ils sont à l'image de nos politiques et de leur doctrine: "faites ce que je dis mais ne faites pas ce que je fais".

Ce ne sont pas des postes de prof qu'il faut éliminer mais ceux de ces inspecteurs. Les profs sont inspectés tous les 8 ans, ce qui est inefficace. Il faut renvoyer ces universitaires devant les élèves et dans les classes qu'ils ont eu vite fait de fuir.

L'éducation nationale est passée maître dans le camouflage des problèmes. L'important est de ne pas avoir de mauvaise publicité. Raté!!!! Mais de toute manière cela finira comme d'habitude car la propagande est en marche (syndicats, recteur, hiérarchie): "elle était fragile,incompétente, etc…."

Condoléances à toute sa famille, sacrifiée sur l'hôtel de la précarité par des bureaucrates inutiles exerçant leur petit pouvoir à tort et à travers avec une impunité totale et dans un silence assourdissant.

Si vous voulez des preuves de leur mépris envers ces personnels, il suffit de se renseigner sur les statuts de: vacataire ("illégal"), contractuel en CDD et en CDI, utilisés par les rectorats.

Pour cela aussi les syndicats sont totalement absents, ils font tout pour vous dissuader de porter plainte au tribunal administratif car si vous le faites vous êtes radié des listes de recrutement (cdd, fin de contrat) et l'année suivante vous vous retrouvez sans emploi. Grande efficacité, non?

Là aussi la hiérarchie savait pertinemment qu'elle n'avait aucun recours en cas de licenciement car le tribunal administratif ne peut obliger les rectorats à ré-embaucher une personne licenciée. Il n'y a que des sanctions financières, et comme ce n'est pas son argent cette situation n'est pas prête de se régler et d'autres drames sont prévisibles.

 

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Il y a vacataire et vacataire, les kleenex, que l'on jette après les avoir usés, et les sparadraps, du type de celui dont le Capitaine Haddock ne parvient pas à se débarrasser dans L'Affaire Tournesol. En l'occurrence il s'agit de l'une des nombreuses affaires Sarkozy, celle des passe-droits dont a bénéficié et continue de bénéficier son fils Jean. Le petit prodige qui, rappelons-le, a démarré sans suite plusieurs cursus puis échoué deux fois à sa deuxième année de droit, a été nommé début 2013 professeur vacataire chargé de travaux dirigés de droit à l'UPEC (Université Paris-Est Créteil Val-de-Marne ou Paris XII), deux ans après l'obtention (en 5 ans) de sa licence en droit. Mais pourquoi donc n'a-t-il pas été envoyé dans un établissement difficile pour enseigner le droit en série technologique? Ma question est naïve?

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Quant aux conditions de travail "objectives et matérielles des enseignants", oh! oui, elles sont très dégradées, surtout celles des profs non titulaires, dont il n'est pas soufflé mot dans les réactions des uns et des autres, notamment des syndicats. Nathalie Filippi faisait pourtant partie de ces travailleurs kleenex de l'EN. Voir le Forum des professeurs précaires

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Réserve déplacée des syndicats. Il y a longtemps qu'ils ne sont plus des organes politiques ni même des organisations de défense des travailleurs, mais des courroies de transmission et des chiens de garde du pouvoir! Quand on sait comment l'administration use et abuse de la précarité des non-titulaires...

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Les syndicats suivent les enseignants; si les enseignants bougent (et ça a l'air de commencer à remuer), les syndicats suivront avec des moyens dont ne disposent pas des profs isolés... Mais les syndicats sont impuissants sans une base combative.

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Faux cela ne dépend pas de la base.

Le snes par exemple n'est même pas pour la titularisation des non-titulaires sans concours (pour ceux de plus de 10 ans d'ancienneté par exemple).

Ils veulent un concours qui est là normalement pour embaucher les meilleurs. Les non-titulaires sont déjà embauchés et inspectés, je ne vois pas pourquoi ce syndicat est contre une titularisation sans concours. En plus le concours réservé au montage duquel ils ont participé est un véritable scandale dans son organisation. Les formations sont inexistantes ou débiles. Pas d'anonymat pour le dossier et aucun renseignement précis sur l'oral. Non vérification de l'éligibilité, etc.......

Un examen en classe aurait été plus logique, plus représentatif et moins cher que ce pseudo-concours qui va permettre tous les copinages.

Les syndicats de l'éducation ne servent à rien pour les non-titulaires. Ils font tout pour vous dissuader de porter plainte au tribunal administratif.

Ils sont complices de ce système qui leur permet de fuir les classes et les élèves.

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À la suite de l'immolation par le feu de Lise Bonnafous dans la cour de son établissement, en octobre 2011, le secrétariat national du SNES avait pourtant cosigné un texte très critique à l'encontre de l'institution scolaire dans lequel le problème qui avait pu conduire au suicide de Lise était reconnu comme objectif et "collectif". Mais il est vrai que Sarkozy était alors encore au pouvoir. Ah! la compromission politique des syndicats soi-disant apolitiques...:

Les réactions nombreuses au drame qui vient de se produire, le lieu où il s'est déroulé, attestent d'un malaise grandissant des enseignants, confrontés à un déni de leur professionnalité, ayant de moins en moins de prise sur un travail saturé de prescriptions et d'injonctions. Entre les réformes contestées, les manques en matière de formation, la dégradation des conditions de travail et les pressions des hiérarchies, c'est bien toute une profession qui est sujette aux tensions, un métier qui est fragilisé. Il s’agit d’un problème collectif. (Frédérique Rolet, Roland Hubert, Daniel Robin. SourceTrois messages pour Lise, professeure martyre)

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Édito du Bulletin du SNES-FSU Nice N°226-mai 2013, signé Richard Ghis, secrétaire académique du SNES :

La profession endeuillée

Nathalie Filippi, enseignante non-titulaire d’espagnol, affectée sur deux établissements cette année (collège de La Bourgade à la Trinité et collège René Cassin à Tourettes-Levens), s’est don­née la mort dans la nuit du 9 au 10 mai. Le SNES-FSU a immé­diatement demandé aux autorités rectorales d’ouvrir une en­quête administrative. Ce geste de détresse, révélateur d’un ma­laise qui va bien au-dela du cas personnel de notre collègue, touche l’ensemble de la profession à bien des titres.

Comment en serait-il autrement quand, année après année, les conditions de travail au quotidien ne cessent de se dégrader? Augmentation de la précarité face à une crise historique de re­crutement dans le second degré, suppressions de centaines de postes au nom de la rigueur budgétaire, effectifs pléthoriques dans les classes de collège comme de lycée, disparition des heu­res de travail en groupes pour toutes les disciplines y compris les disciplines expérimentales, pressions accrues des hiérarchies locales avec la mise en œuvre d’un «management» totalement inadapté aux besoins et au fonctionnement du système scolaire.

Alors que la démocratisation du système éducatif est en panne depuis près de vingt ans, après les progrès enregistrés jusqu’au milieu des années 90, tout est mis en œuvre par l’État employeur pour nous placer dans les conditions d’un «travail empêché» comme le développent plusieurs équipes de chercheurs.

L’affichage de la loi sur la refondation de l’école cache mal l’abandon et le manque d’ambition du politique vis-a-vis du se­cond degré et de ses personnels, et ce n’est pas l’annonce et la mise en œuvre de la suppression de près de 2000 AED (per­sonnels de surveillance) au plan national qui va améliorer notre quotidien dans nos collèges et nos lycées.

Le désarroi, enfin, s’accroît à l’annonce des propositions en matière de retraite du président de la république prônant entre autre un nouvel allongement de la durée de cotisations pour une retraite à taux plein et celles du MEDEF demandant un nou­veau recul de l’âge de départ en retraite.

Toutes ces attaques ne peuvent qu’aggraver le malaise actuel des personnels d’enseignement, d’éducation et d’orientation.

Le SNES-FSU présente ses sincères condoléances à la famille de Nathalie, à ses proches ainsi qu’à ses collègues de travail. Le SNES-FSU continuera à se tenir aux côtés des collègues en souf­france professionnelle et à agir pour une réelle amélioration de nos conditions de travail au quotidien. C’est notre combat. Nous le devons aussi désormais à la mémoire de Nathalie.

Nice, le 21 mai 2013, Richard Ghis

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Révélations saisissantes de Nice-Matin. Le quotidien a publié le 16 mai des extraits des notes que Nathalie Filippi prenait quotidiennement au sujet de sa situation impossible au Collège La Bourgade de La Trinité (06). Elles sont édifiantes! À lire absolument : Exclusif. Nice-Matin révèle les carnets secrets de l'enseignante de La Trinité. On apprend également dans le même article qu'elle était très appréciée et tenue pour un professeur très compétent dans le collège de Tourrette-Levens où elle complétait son service, puisqu'elle avait été nommée à cheval sur deux demi-postes.

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Voici les autres extraits du carnet de bord tenu par Nathalie Philippi parus dans l'édition de Nice-Matin du Jeudi 16 mai. (On peut cependant remarquer certaines libertés prises par le quotidien avec la lettre du manuscrit en comparant les clichés des extraits des 4 et 5 avril avec leur transcription).

«Non daté : Décridibilisée aux yeux des élèves.

Jeudi 4 avril 8h à 9h : Pendant le cours, un élève assis au fond de la classe s'amusait à jouer avec l'interrupteur. J'ai dû interrompre le cours plusieurs fois pour lui demander de se calmer. Puis, lorsque j'étais en train d'écrire au tableau, il en a profité pour jeter une chaise par la fenêtre ouverte. J'ai entendu un bruit, mais je ne me suis pas doutée de ce qu'il avait fait. A 9h, l'adjoint est venu dans ma classe et m'a appris que ça venait de mes élèves. Le coupable a été démasqué de suite et ne s'en est pas caché. A 13h, j'ai été convoqué dans le bureau du principal et de son adjoint. Comme le professeur principal de l'élève est un ami, il est venu assister à la rencontre. Je n'ai pas dit un mot. Tantôt le principal, tantôt son adjoint ont répété que j'étais une incapable et une incompétente. Mon collègue est intervenu en précisant que si je n'avais pas d'élèves aussi agités, ce genre d'incident n'arriverait pas. M. le principal a rétorqué que, quand bien même, je serais incapable de tenir une classe.

Extrait du journal de bord de Nathalie Filippi en date du 4 avril 2013, 8h à 9h. Photo Nice-Matin

Non daté : Tables sorties de la classe et entassé dans le couloir après la sonnerie de fin des cours. Un élève qui traînait dans les couloirs a fait irruption dans ma classe en plein cours, s'est saisi d'une chaise qu'il a jetée sur quelqu'un. Il s'est sauvé. Par chance la chaise a atterri sur le mur.

Non daté : Accablée devant M. Je lui disais avec véhémence de mettre un terme à son comportement devant ma classe (capuche sur la tête et hurlements et menaces contre moi).

Vendredi 5 avril 10h : A 10h, j'en ai profité pour dire au principal qu'en début d'année j'avais des problèmes de discipline avec 6 élèves d'une même classe, mais que depuis décembre ça allait mieux. Je lui ai expliqué que j'aimais profondément ce métier vers lequel je m'étais tournée assez tard. Il m'a écouté gentiment et m'a dit: ”Je ne vais pas pratiquer la langue de bois et je vais vous dire que vous êtes dangereuse”. Moi: “Dangereuse?!” Lui: “Oui, pour les élèves. Sous le coup de la colère vous pourriez avoir un mauvais geste”.

Extrait du journal de bord de Nathalie Filippi en date du 5 avril 2013 à 10h. Photo Nice-Matin.

15 avril (vacances de Pâques) : J'ai reçu un appel du collège me disant qu'une convocation était partie pour que je me rende chez le médecin du rectorat le 24 avril. D'un ton péremptoire, il m'a été conseillé de réunir tous les documents prouvant que j'avais le droit de prendre du Zomig (N.D.L.R: ce médicament est un vasoconstriteur puissant utilisé dans le traitement de la migraine).

Non daté : Je suis convoquée et, sans savoir, m'a morigénée (N.D.L.R.) parce que j'aurais insulté un élève (G)...»

Extrait du journal de bord de Nathalie Filippi, non daté. Photo Nice-Matin.

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En déclarant, dans le Nice-Matin du 14 mai, qu'il n'avait eu que des "échos" des difficultés de Nathalie Filippi (qui de surcroît n'auraient concerné que, je cite l'encadré, "des problèmes avec certains élèves difficiles, des frictions dans la mise en place de certaines réformes ou par rapport à une manière de travailler", et en rien le harcèlement qu'elle subissait de la part de la direction du collège), le secrétaire général du SNES-FSU pour l'académie de Nice ou bien ne dit pas la vérité ou bien est mal informé par ses délégués d'établissement (et dans ce cas aurait dû mieux se renseigner avant de s'exprimer publiquement sur un drame d'une telle gravité), car selon l'édition de Nice-Matin du 16 mai c'est sur le conseil de son délégué syndical (elle était donc syndiquée) que Nathalie Filippi s'était mise à consigner au jour le jour les difficultés qu'elle rencontrait dans l'exercice de son métier, notamment les vexations de la direction. Voici en effet comment Nice-Matin présente les choses (on remarquera au passage que Nathalie avait, elle, le sens de la responsabilité et de... la solidarité):

Parce qu'elle était vacataire, qu'une mauvaise appréciation risquait de lui fermer les portes d'un « métier passion », son délégué syndical lui avait conseillé de rédiger ce rapport au quotidien, au cas où... Nathalie s'y était résignée. A son compagnon, elle assurait pourtant que jamais, elle ne le transmettrait à quiconque. Par solidarité avec l'institution, confie-t-il.

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L'article exprime bien les raisons qui ont poussé Mme Nathalie F. à ce geste tragique et je comprends le désespoir et la colère de ses proches.

«Combien de suicides de professeurs faudra-t-il encore pour que soit pris en compte le "mal vivre" des enseignants victimes de leur métier? Victimes de certains élèves (un petit nombre de causeurs de troubles) impunis, qui perturbent volontairement toute une classe et provoquent sans répit leur professeur. Victimes aussi de leur hiérarchie, chefs d'établissement en tête qui préfèrent sanctionner l'enseignant que les élèves perturbateurs : une inspection ne peut régler le problème et accentue le malaise du professeur. Victimes enfin du manque de soutien des autres collègues qui parfois même accablent leur collègue, et souvent même le délégué syndical, soucieux de ses bonnes relations avec l'administration et aussi d'avoir un bon emploi du temps, est "absent". C'est ainsi que sont broyées des vies... à jamais. Madame je ne vous connaissais pas mais je vous dis mon respect et j'adresse à vos proches ma sympathie et leur souhaite beaucoup de courage.»

Voici le texte que je viens d'écrire dans la page de Facebook dédiée à Mme Lise B., professeur de Math qui s'est suicidée en Octobre 2011 dans la cour du lycée Jean Moulin à Béziers. On est obligé de constater que les choses ont peu changé et que les mêmes causes engendrent de telles tragédies.

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@ Prof

Après un petit tour d'horizon, il faut hélas conclure que le silence semble bien se refermer sur le destin de Nathalie Filippi, et ce malgré de lointains échos (par exemple, B. Gonthier-Maurin, sénatrice CRC, déclare dans l'Huma du 23 mai, au sujet du récent rapport de la Cour des comptes, que la «souffrance au travail – avec à la clé, comme dans d’autres professions, des suicides -, est vraiment très présente dans le corps enseignant»).

Quinze jours se sont écoulés depuis la mort de Nathalie, et déjà l'oubli...

Sur Twitter l'utilisation du hashtag de son nom est bloquée. Neoprofs, forum sur lequel des professeurs s'étaient émus du drame, ne reçoit plus de messages à son sujet. Les derniers versent dans le travers de la "médicalisation" que redoutait et dénonçait l'enseignante d'espagnol (cf. infra). Sur le site de Nice-Matin, les commentaires s'arrêtent au 17 mai. La presse nationale a peu traité le drame. Triste victoire du "système".

«Re: Collège La Bourgade à La Trinité (06) : une prof se suicide

Message par Ergo le Mar 21 Mai 2013 - 16:50

Ce qui relance la question: à quand une vraie médecine du travail indépendante ?»

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Et la Cour des comptes qui va encore nourrir la hargne populaire contre les enseignants par le rapport qu'elle a publié ce mercredi sur leur mauvaise gestion gouvernementale! Son propos n'est certes pas directement de dénoncer la fainéantise des profs, mais c'est malheureusement cela qu'entendra le gros du peuple. Et au fond ce que souhaite Didier Migaud, le président de la Cour des comptes, et père de la LOLF, c'est bien que les professeurs travaillent plus pour une dépense globale moindre (si même il propose d'en payer davantage les "meilleurs"). Migaud et ses pairs "ignorent" les finalités mais aussi les seuls véritables moyens de l'Ecole qu'ils proposent de sacrifier une fois de plus sur l'autel de la rentabilité. Que ces gens viennent donc passer une journée dans un collège difficile, qu'il s'y assoient à la place des maîtres, seulement le temps d'une journée, alors peut-être comprendront-ils que leur discours purement comptable sur "la gestion" des moyens est crétin et... assassin! Si la Cour des comptes a la mission de "s’assurer du bon emploi de l’argent public et d'en informer le citoyen", alors ses membres devraient en passer par là. Sans quoi elle rapporte sans savoir, et ne fait qu'un travail de propagande idéologique, loin de remplir sa noble tâche.

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Le collège La Bourgade à La Trinité avait-il assuré la mise en place des heures de vie de classe, et si oui, Nathalie Filippi a-t-elle pu bénéficier d'une intervention dans ces heures, comme le prévoient les textes, pour recadrer ses élèves les plus indisciplinés? Là encore la responsabilité de l'établissement et, au-delà, celle du Ministère de l'Education Nationale sont engagées.

Les heures de vie de classe (HVC), instituées officiellement en 1999, sont entre autres un temps de médiation pour prévenir, désarmorcer ou résoudre les problèmes d'incivilité, de violence, de démotivation, de vie personnelle, d'adolescence... qui perturbent le fonctionnement d'une classe (cf. sur cndp.fr : Un temps de parole et de régulation de la vie scolaire).

Voici la définition de l'objectif et des modalités des HVC inscrite dans le Supplément au n°23 du B.O. du 10 juin 1999 (définition suivie de quatre exemples):

 

Vie de la classe

Objectifs
- Permettre une prise de parole des élèves et un dialogue avec un ou plusieurs adultes.
- Aborder des questions qui ne peuvent trouver leur place dans les cours : problèmes d'actualité, de société, de citoyenneté, de vie au collège.
- Prévenir les problèmes de comportement.
- Éduquer au respect des autres, à la maîtrise de l'écoute des autres, apprendre à articuler les arguments.
- Dialoguer sur le règlement intérieur et élaborer une Charte des droits et des devoirs au collège et/ou dans la classe.

Modalités
- Une heure est inscrite à l'emploi du temps des élèves pour la vie de la classe, en moyenne tous les quinze jours, de la 6ème à la 3ème.
- L'organisation de cette heure est confiée au professeur principal avec la possibilité d'interventions d'autres adultes : autres professeurs, conseiller principal d'éducation, conseiller d'orientation psychologue, intervenants extérieurs...
- En 3ème, cette heure sera consacrée plus largement à l'éducation à l'orientation et aux choix d'orientation de chaque élève. Les interventions de conseillers d'orientation psychologues seront donc les plus fréquentes possibles. Des personnes parlant de leurs activités seront sollicitées, ainsi que les contacts avec des élèves et des enseignants des lycées (notamment techniques et professionnels).

 

Exemples :

Collège Henri Barbusse (situé en ZEP), Vaulx-en-Velin, Rhône
Un dispositif de vie de classe est mis en place à l'échelle de tout l'établissement. Deux heures de cours, de 10h à 12h, sont banalisées cinq fois dans l'année. Pendant la première heure, chaque classe est prise en charge par son professeur principal. Pendant la deuxième heure, seuls restent les délégués de classe qui sont réunis avec les adjoints, par niveau, pour faire la synthèse de leur classe. Pendant ce temps, un bilan du déroulement de la séance avec la classe est fait par les professeurs principaux. Une synthèse générale par niveau est établie puis communiquée à la classe par le professeur principal et les délégués. L'objectif de cette action est double : donner un espace de parole aux élèves pour prévenir la violence et mettre les délégués en situation de porte-parole des élèves de leur classe, au niveau de l'établissement.

Collège Les Vernes, Givors, Rhône
L'action a concerné l'ensemble des classes de 5ème. Elle a été menée par les professeurs principaux et coordonnée par la CPE. Une heure par quinzaine y a été consacrée. L'objectif de cette action était d'améliorer la communication professeur/élève et élève/élève en décodant discours et attitude et en apprenant à gérer ses émotions. Au premier trimestre, un travail sur les règles de la classe et sur les problèmes administratifs a été mené, puis il a porté sur l'ambiance et la préparation d'un projet de sortie. Le deuxième trimestre a marqué le début du travail sur les émotions : l'outil vidéo a été utilisé pour une prise de conscience du fonctionnement du groupe classe. Le troisième trimestre a permis à deux classes de travailler sur le vocabulaire des émotions notamment à travers un jeu de rôle.

Collège Longchambon (situé en ZEP), Rhône
L'heure de vie de classe en 6ème est inscrite à l'emploi du temps des élèves. Elle est coanimée par le professeur principal et un autre membre de l'équipe. Différents thèmes y sont étudiés : la connaissance du collège, du personnel, du règlement intérieur, la gestion des conflits, de la violence...Ces séances se font sous forme d'animation, de mini jeux. Il s'agit de "bien vivre ensemble".

Collège Albert Camus, Dreux, Eure-et-Loir
Dans le cadre de l'éducation à la citoyenneté, plusieurs actions ont été mises en place parmi lesquelles, au niveau de chaque classe, des débats à partir de situations pratiques empruntées à la vie scolaire, menés par les professeurs principaux.

Mais ces heures sont en fait rarement mises en place par les établissements. Elles ne peuvent être insérées dans l'emploi du temps des professeurs, sinon dans celui des élèves où elles doivent en principe figurer. Elles sont donc à faire par les enseignants en plus de leur service. Elles ne sont pas payées en tant qu'HSA ni HSE. Il est estimé qu'elles le sont par l'Indeminité de suivi et d'orientation des élèves (ISOE - plus ou moins 100€ par mois selon le niveau des classes en charge) qui inclut une part fixe rémunérant le suivi des élèves, leur évaluation et la participation aux conseils de classe, et une partie variable attribuée aux seuls professeurs principaux. Ce sont ces derniers qui ont, entre autres obligations spécifiques liées à leur principalat, à charge d'organiser les HVS. Mais ils sont de plus en plus accablés de tâches multiples, notamment de besognes strictement administratives...

Pas un mot sur le sort funeste réservé à ces heures dans le Projet de loi pour la refondation de l'Ecole de Vincent Peillon. Et pourtant refonder ou tout simplement «ajouter à la fondation» de l'Ecole, c'était ce que les Anciens, évoqués par le Ministre à travers l'Ecole d'Athènes, appelait l'autorité (du lat. «augere», augmenter, et non pas «gerere», gérer, soit dans son sens actuel: manager...).

Quant au rapport de la Cour des comptes, il prêche pour la suppression de l'ISOE et une redéfinition plus large du service des enseignants incluant toutes les activités qui actuellement entrent dans leurs missions sans faire pour autant partie de leurs obligations de service, dont le travail en équipe, l'accompagnement personnalisé des élèves et, implicitement, donc, les heures de vie de classe. Mais implicitement seulement. C'est que, sous l'invocation constante de la réussite des élèves, le principal souci des rapporteurs de la Cour des comptes est l'annualisation du temps de travail des enseignants et leur mobilisation au sein d'équipes pédagogiques dont la composition ne devrait plus tenir compte des différences de corps ni même de discipline, le tout pour mieux gérer... financièrement (et idéologiquement!) les profs.

Voici une illustration, un exemple d'heure de vie de classe filmée à Villiers-le-Bel à l'école Emile Zola, dans la classe de Nadia Garcin en juin 2008. «Le sujet porte ce jour sur le chahut qui se produit régulièrement le vendredi avec l'autre maîtresse. Le débat se déporte sur une critique de la maîtresse du vendredi. La maîtresse présente recadre le débat».

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"Une étude conduite par l’Inserm, en 2002, évoque un taux de 
39 cas de suicide pour 100 000 professeurs, contre 16,2 pour 100 000 habitants en moyenne 
dans les autres professions." Les médias ne disent pas les choses. Pourquoi? Voir ce papier du Parti de Gauche : Malaise et suicide dans l'Education nationale. Il rapporte en particulier le cas d'une enseignante qui aurait eu, elle aussi, des problèmes personnels déterminant son geste fatal, toujours selon les sources officielles. Possible, bien sûr, mais elle enseignait en SEGPA, pas la section la plus facile... Et puis pourquoi ces personnes dont on dit qu'elles "allaient mal" ont-elles mis fin à leurs jours dans l'enceinte de leur établissement scolaire? 

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Un article paru sur aideauxprofs.org qui rassemble les données du web sur la question et qui épingle « l'argument massue imparable et inusable "cette personne avait des problèmes personnels et était accompagnée pour les résoudre" » : Les suicides des enseignants, ou l'omerta d'un système impuissant, qui préfère s'en dédouaner (article désormais indisponible -2015)

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Je suis le père de Nath. Je voudrais répondre à ""mimisecu"". Le problème n'est pas de savoir si à 44 ans on se sent capable de faire ce métier. Bien sûr qu'on en est capable puisque depuis 5 à 6 années Nath a des notes de fin d'année. Ttes félicitent Nath d'avoir tenu une classe difficile. Tjrs présente, même malade. Pas 1 jour d'absence, tjrs à l'heure. Evidemment qu'elle a refusé le congé de maladie que ses supérieurs voulaient (8 jrs avant les vacances de Pâques), elle ne vivait que pour son métier. 12h de cours au collège, 40 heures de préparation pour ses cours. Mais lorsque des voyous sont punis, ils obtiennent une forte sanction: """""1 JOUR D'EXCLUSION DU COLLEGE AVEC SURSIS """"", signé du PRINCIPAL... Par contre le prof est considéré comme non professionnel, dangeureux pour les élèves. Je suis désolé, la hiérarchie n'est pas à la hauteur, c'est elle qui n'est point professionnelle... Je me demande même pourquoi à l'heure actuelle le PRINCIPAL ET L'ADJOINT ne sont pas suspendus pour une affaire aussi grave, qu'ils ont créée. Ils ont harcelé ma fille, dévalorisé Nath. QU'ILS DORMENT TRANQUILLE, ELLE AUSSI DORT A JAMAIS... MERCI A TOUS POUR VOTRE SOUTIEN ET VOTRE RECONFORT...

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Dans le Bulletin du SNES-FSU Nice N°226-mai 2013, à la suite de l'édito de Richard Ghis (cf. infra), le Secrétariat académique du SNES-FSU publie un long article où il rend justice à Nahalie Filippi et où il exprime enfin clairement les positions de ce syndicat touchant les conditions objectives et collectives, les conditions d'un «travail empêché», susceptibles d'affaiblir tous les enseignants au point d'exposer au suicide les plus fragilisés. Le Secrétariat rappelle également qu'un «douloureux précédent avait déjà eu lieu dans notre académie en 1976 avec le suicide de Renée Boudouresque; <et qu'> elle était maîtresse auxiliaire».

 

VIVE ÉMOTION DANS LA PROFESSION

Une de nos collègues, Nathalie Filippi, professeur vacataire d’Espagnol a mis fin à ses jours dans la nuit du 9 au 10 mai.

Elle avait fait part de sa souffrance au travail à ses proches. Les notes qu’elle avait commencé à rédiger pour l’exprimer ne laissent pas de doute sur ce point.

Il faut toujours un élément déclencheur pour en arriver à une telle détresse ultime, mais le suicide d’un enseignant renvoie souvent à une souffrance dans l’exercice de ses fonctions.

L’administration lui avait annoncé une inspection. Nous ne savons que trop ce que cela peut signifier, surtout pour une enseignante non titulaire. «La précarité affecte profondément celui ou celle qui la subit: en rendant tout l’avenir incertain, elle interdit toute anticipation rationnelle et, en particulier, ce minimum de croyance et d’espérance en l’avenir qu’il faut avoir pour se révolter, surtout collectivement, contre le présent, même le plus intolérable.» Cette citation du sociologue Pierre Bourdieu est mise en exergue du dernier numéro de la revue Actes de la recherche en sciences sociales.

Une enquête administrative est ouverte. Si nous devons, en l’attente, rester prudent, pourra-t-on attribuer, au final, cet acte ultime de désespoir à la seule «fragilité personnelle» d’une jeune femme? Ce serait un peu trop simple!

Un rapport de Georges Fotinos, ancien chargé de mission à l’inspection générale, sur «la qualité de vie au travail dans les collèges et lycées», révèle que quelque 17% d’enseignants souffriraient d’épuisement professionnel – le fameux burn­out –, contre 11% en moyenne dans les autres professions. De même, une étude conduite par l’Inserm, évoque un taux de 39 cas de suicides pour 100.000 professeurs, contre 16,2 pour 100.000 habitants en moyenne dans les autres professions.

Alors, les enseignants, des êtres humains plus fragiles que les autres?

Non! Nous ne pouvons accepter cette logique réductrice. Les enseignants sont de plus en plus confrontés à des conditions de travail où ils se retrouvent psychologiquement affaiblis: manque de formation, manque de reconnaissance, isolement croissant – car toutes les nouvelles dispositions des multiples réformes permettent de moins en moins le travail en équipe –, charge de travail de plus en plus lourde, classes surchargées surtout en zone sensible, public qui change et évolue sans qu’il leur soit donné les réponses à apporter... Plus fragiles, certainement pas; plus exposés, sûrement!

Au lieu d’améliorer les conditions générales de travail des enseignants, dont la pénibilité s’est considérablement accrue ces dernières années, lorsque les enseignants osent enfin exposer leurs problèmes, leur hiérarchie, la plupart du temps, leur reproche de manquer d’autorité, les fait culpabiliser en les rendant responsables de l’échec scolaire... Et, dans le cas de nos collègues non titulaires, brandissent même la menace de «non-­renouvellement de contrat».

Un douloureux précédent avait déjà eu lieu dans notre académie en 1976 avec le suicide de Renée Boudouresque; elle était maîtresse auxiliaire.

Pourtant on attendrait, au contraire, soutien, écoute et accompagnement de la hiérarchie et de l’institution devant les difficultés rencontrées. Tout simplement parce que la loi le stipule: «Les enseignants bénéficient au titre de leurs fonctions de la protection fonctionnelle des agents publics de l’État (article 11 de la loi du 13 juillet 1983). L’administration a l’obligation légale de protéger ses agents contre les attaques dont ils peuvent faire l’objet dans l’exercice de leurs fonctions. La responsabilité de l’employeur public peut être admise dès lors qu’il s’est abstenu de mettre fin au harcèlement lui causant ainsi préjudice.»

Tout le monde connaît pourtant la réponse à ce malaise grandissant, nos dirigeants vont-ils rester encore longtemps sourds et silencieux? Rétablissons dans les établissements les milliers de postes supprimés ces dernières années, pour retrouver des effectifs raisonnables; rétablissons une véritable formation initiale et continue des enseignants, exigeons la mise en place d’une véritable médecine du travail dans l’Éducation nationale, d’un service des ressources humaines qui permettrait d’accompagner au plus près tous les personnels, et plus encore ceux en situation de fragilité, donnons-nous vraiment les moyens de construire cette école de la République pour laquelle nous nous sommes engagés.

Notre métier est de ceux, tout le monde le reconnaît, où les personnels sont les plus exposés au stress: stress accru avec les nombreuses réformes de ces dernières années et leur accumulation de tâches et de contraintes, stress accru sous la pression de directions aux méthodes de plus en plus «managériales». Les enseignants ont bien du mal aujourd’hui à s’épanouir dans leurs établissements et à accomplir pleinement et positivement leur mission.

Pourtant, les enseignants aiment leur travail. Ils l’ont choisi et souhaitent continuer à pouvoir l’exercer sereinement, tout comme Nathalie aurait souhaité pouvoir le faire.

En soutien à ses proches et en témoignage de la difficulté que nous éprouvons tous à accomplir pleinement notre mission d’enseignant, le SNES-FSU a demandé que soit observée une minute de silence à l’occasion des instances rectorales qui se sont tenues depuis.

Afin que tous ensemble, nous puissions dire «Plus jamais ça»!

Le Secrétariat académique du SNES-FSU

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Gérard Papy: "L’absence de reconnaissance est « constitutive de l’épuisement professionnel », écrivez-vous. Est-ce un facteur essentiel ?"

Pascal Chabot: "Oui. La reconnaissance est constitutive de l’identité de l’individu. Quelqu’un qui ne serait reconnu par personne pourrait certes exister mais serait une sorte de surhomme. Nietzsche est de ceux qui prétendent que l’humain n’a qu’à se forger lui-même. Cela vaut pour une petite minorité. Le contrat de travail, c’est du temps contre de l’argent, de la qualité contre de la quantité. Les individus travaillent d’abord pour cela. Mais la reconnaissance, si elle vient saluer un travail bien fait, introduit de l’humanité dans ce contrat. La reconnaissance est beaucoup analysée par la philosophie et la sociologie allemandes qui lui accordent une place centrale. Pourquoi ? Parce que l’humain se voit reconnaître comme irremplaçable, non « délocalisable » et il n’est pas mis en rivalité avec la machine. Le management dans les années 1980 - 1990 a beaucoup joué sur des dénis de reconnaissance, intentionnellement, parce que c’est la meilleure façon de casser une personne. Voyez les dégâts que cela a provoqués chez France Télécom... La prise de conscience de ces travers a conduit à un management plus humaniste.

[...]

Les enseignants et les professionnels de la santé sont les plus touchés par le burn-out. Pourquoi ?

Herbert Freudenberger, le psychiatre new-yorkais qui a forgé la notion de burn-out pointait, dès l’origine, les médecins, les infirmières, les enseignants, les travailleurs sociaux... On ne peut s’empêcher de penser à la phrase de Freud : « Avec la modernité, il y a trois métiers impossibles : soigner, éduquer, gouverner. » Deux d’entre eux sont épinglés par Freudenberger. Dans les métiers d’aide, la fragilité de l’humain se montre beaucoup plus que dans l’environnement matériel techno-scientifique et on n’est jamais certain que la mission sera parfaitement accomplie. Une autre façon de l’exprimer est de constater qu’il y a deux types de progrès, le progrès utile et le progrès subtil. Le progrès utile, techno-scientifique, est linéaire : on ne doit pas réinventer les ordinateurs pour les perfectionner ; on va toujours plus loin. Les métiers de l’humain sont en prise continue avec un cycle : les enfants naissent ; il faut leur apprendre à parler et tout reprendre dès le début... Ce sont les métiers les plus précieux parce que c’est en eux que s’expriment le mieux les idéaux d’une société. Or force est de constater que ce sont ceux qui, financièrement ou symboliquement, sont souvent négligés."

Lire la totalité de cet entretien avec Pascal Chabot, auteur de Global burn-out

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Terrible réquisitoire contre les politiques, l'inspection et les syndicats que la veille de la prérentrée cet enseignant du Lycée Artaud de Marseille a adressé à ses collègues avant de se suicider :

« [...] L’ensemble du corps inspectoral est criminel ou lâche ou les deux d’avoir laissé faire une chose pareille. Cette mécanique est conçue dans une idée de concurrence entre les enseignants mais aussi entre les établissements pour créer une dynamique de très bonnes notes à l’examen y compris et surtout si elles n’ont aucun sens. Vous avez l’explication des excellents résultats du cru 2013 du baccalauréat au moins pour la filière technologique. Cela fait plus d’un an que je me plains à mon syndicat de cet état de fait. Pas un seul compte-rendu ni localement sur Marseille ni à un plus haut niveau n’en fait mention.

Je suis tout seul à avoir des problèmes de conscience. Ou alors le syndicat est activement complice de l’état de fait, le responsable local me dis : "mais non Pierre tu n’es pas tout seul". En attendant je ne vois aucune réaction et ce chez aucun syndicat. Que penser ? Soit nous sommes muselés, soit je suis le dernier idiot dans son coin. De toute façon je n’accepte pas cette situation.

Je pense au niveau toujours plus problématique des élèves, autrefois on savait parler et écrire un français très convenable après 5 ans d’étude primaire. Aujourd’hui les élèves bachelier maîtrisent mal la langue, ne savent plus estimer des chiffres après 12 ans d’études. Cherchez l’erreur. La réponse de l’institution est : "oui mais les élèves savent faire d’autres choses". Je suis bien placé dans ma spécialité pour savoir que cela n’est pas vrai ! Les élèves ne maîtrisent rien ou presque des techniques numériques d’aujourd’hui. Tout ce qu’ils savent faire est jouer et surfer sur internet. Cela ne fait pas un compétence professionnelle. Les médias nous rabattent les oreilles sur la perte de compétitivité du pays en laissant entendre que le coût du travail est trop élevé.

Cette présentation pèche par une omission grave. La réalité est que le travail en France est trop cher pour ce que les travailleurs sont capables de faire véritablement. Et là la responsabilité de l’éducation nationale est écrasante. Qui osera le dire ? J’essaye mais je me sens bien petit. J’essaye de créer un maximum d’émoi sur la question. J’aurais pu m’immoler par le feu au milieu de la cour le jour de la rentrée des élèves, cela aurait eu plus d’allure mais je ne suis pas assez vertueux pour cela.

Quand vous lirez ce texte je serai déjà mort.

Pierre Jacque

enseignant du lycée Antonin Artaud à Marseille »

LIRE OU TELECHARGER LA TOTALITE DU TEXTE DE PIERRE JACQUE

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«Le métier tel qu’il est devenu au moins dans ma spécialité ne m’est plus acceptable en conscience»... Nonobstant la spécificité de l'enseignement que dispensait ce professeur, et les conditions particulières dans lesquelles il exerçait (en zone d’éducation prioritaire), les professeurs sont désormais légion qui pourraient dresser le même constat et le même réquisitoire. Aussi le communiqué du Ministre n'est-il pas digne:

« Déclaration de Vincent Peillon - Communiqué de presse - Vincent Peillon - 02/09/2013

Je tiens à exprimer ma très vive émotion après le suicide d’un professeur d'électronique du lycée Antonin Artaud à Marseille.

Les circonstances de ce décès, survenu à la veille de la pré-rentrée, sont particulièrement tragiques. Elles rappellent que les professeurs accomplissent une mission essentielle, dans des conditions parfois difficiles. Il est plus que jamais impératif pour la Nation de redonner aux enseignants et aux personnels de l’éducation nationale toute la considération et le soutien qu’ils méritent.

A ma demande, le directeur académique des Bouches-du-Rhône s’est rendu dans l’établissement dès ce matin et une cellule de soutien psychologique a été mise en place au sein du lycée.

Dans ce moment douloureux, mes pensées vont d’abord à sa famille et à ses proches à qui j’adresse mes plus sincères condoléances. Mais aussi à la communauté éducative, toute entière frappée par ce drame, je veux dire ma solidarité pleine et entière.» (C'est moi qui souligne).

Les conditions dans lesquelles était contraint d'enseigner Pierre Jacque n'étaient pas exceptionnelles. D'après son mail et l'avis de ses collègues, il ne manquait pas de considération. Quant à l'invocation de la Nation, elle est une dérobade de plus de la part du ministre EN CHARGE de l'Education NATIONale! Vincent Peillon n'est en rien solidaire de la communauté éducative.

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Depuis le 5 octobre 2013, AIDE AUX PROFS est devenu co-éditeur d'une collection Education et Formation chez l'éditeur MEMOGRAMES, créé par un ancien professeur de Français en Belgique, dont vous pouvez découvrir le parcours de carrière.

Le premier ouvrage de cette collection s'intitule : Souffrir d'enseigner: faut-il rester ou partir ? de Rémi BOYER et José Mario HORENSTEIN, et il est préfacé par Georges FOTINOS.

C'est un guide pratique encyclopédique pour vous aider dans toutes les difficultés que vous pouvez rencontrer dans votre métier, quelles qu'elles soient, pour vous permettre de vous remotiver, en conservant votre estime de vous et votre énergie. 

Nous y avons rendu hommage, en les citant, à de nombreux enseignants qui, ces dernières années, se sont suicidés, et y avons consacré un chapitre complet dans l'ouvrage, pour que l'on sorte de cette omerta justement, et que la prévention des risques psycho sociaux prenne de l'ampleur. José Mario HORENSTEIN livre à ce propos de nombreuses pistes de remédiation très intéressantes, et de nombreuses adresses de structures d'aide gratuites.

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Peut-on tenter de faire un bilan d'étape sur la situation du MEN depuis la fin des années 2000? Où en est-on, quelle évolution constate-t-on ?

Comment peut-on caractériser une telle situation ? S’agit-il d'un enterrement organisé en catimini ? S’agit-il d'un sketch pas forcément très drôle ou encore d'un extrait d'Ubu roi d'Alfred Jarry? Personne ne le sait. Personne n'osera répondre du reste la situation étant vraiment trop gênante, trop incommodante. Tout le monde, ou presque, est mal à l’aise.

Pour autant plusieurs mesures ont été prises par le MEN depuis 2009: suppression des IUFM puis création des ESP, charte de la laïcité (à l'intention de ceux qui ignorent que l'enseignement public en France est laïc), intense campagne de diffamation dirigée contre les enseignants à propos du harcèlement à l'école, enfin réforme du collège dont personne ou presque (à l'exception de Mme la Ministre et de quelques recteurs) ne veut.

Du coté de ceux qui vivent l'enseignement (# ceux qui en vivent) les problèmes sont différents et deviennent de plus en plus épineux:

=> le nombre de suicides (réussis) est monté en flèche
=> le nombre de candidats aux concours de l'enseignement s'est effondré au point que l'on peut légitimement s'inquiéter du recrutement des futurs enseignants
=> toutes les enquêtes le montrent: l'école française est de moins en moins efficace et produit de plus en plus d'échecs
=> la répression menée par les autorités rectorales à l'encontre des récalcitrants ou tout simplement de ceux qui font usage de leur droit d'expression n'a jamais été aussi violente que depuis... la deuxième guerre mondiale, c'est-à-dire depuis le régime de Vichy.

Peut-on prédire ce qui va se passer, peut-on se risquer à jouer les Cassandre ? Ceux qui ont étudié le fonctionnement des régimes autoritaires/totalitaires savent que les contestations n'ont jamais été étouffées parce que cela est impossible. Ces contestations ont parfois pris une forme spontanée, d'autres étaient plus réfléchies ou plus souterraines (« underground »). Je pense, pour ma part, que cette contestation tous azimuts et non moins profonde, débouchera sur des actions collectives spontanées (et coordonnées => c’est mieux !), vraisemblablement assez violentes, conformément au tempérament politique français... et par-delà les traditionnels clivages politiques/idéologiques. Il faut dire, avouer même que les dirigeants du MEN s’y prennent assez bien, depuis au moins un certain M.Allègre, pour provoquer semblable mouvement contestataire, pour fédérer aussi les contestations ! Qu’ils se rassurent… pour l’instant tout va bien ou presque. Ca n’est pas encore prêt mais ça ne saurait tarder.

Dernière remarque : pourquoi le blog « omerta au rectorat » (fort bien informé) a-t-il été fermé ? L’information serait-elle devenue genante pour les « autorités » rectorales ?

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La démission, ce sont les enseignants qui en parlent le mieux sur le web...

Je recommande vivement la lecture de cet article de Rémi Boyer, Président-Fondateur de l’association Aide aux Profs, qui offre une excellente synthèse sur le malaise des enseignants d'aujourd'hui et qui pointe vers de nombreux liens instructifs et utiles.

Je la recommande à tous mes collègues qui se posent des questions sur leur avenir dans l'Education nationale et à ceux qui envisageraient d'y entrer, non pas pour en détourner les uns et les autres mais pour leur permettre de mieux comprendre les difficultés dans lesquelles ils se débattent ou qui les attendent. Pour la même raison, cette lecture est encore hautement recommandable à ceux qui parlent du métier de professeur sans toujours savoir de quoi il s'agit.