- dim, 2011-01-30 18:34
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La connaissance productive du Réel
Aspirant vulnérable
Ne se remporte pas d’après une mesure compliquée de larmes une construction joyeuse de ruses
Mais est obtenue par une sorte de commotion graduée de fortune
Extraite du grossier
Sous le gel de laquelle
Vient s’établir
À l’écart des courants
L’imbattable ordonnance qui préside en géologie à la formation excentrique des îles en amour à l’obscurcissement de la volupté aussitôt les époques du squelette déterminées en métallurgie à l’épaulement des espaces
Ce n’est qu’à cette option des valeurs autant qu’à cette épargne de promesses
Effet d’une tactique fructueuse
Qu’elle peut sentimentalement passer pour collectivement satisfaisante
Je te débusque lumière
À la suite formons un couple
Tel nous serons introduits
— oh de manière discrète ! —
À la réception vécue écourtée de la réalité
Où commande notre indifférence notre expérience !
Réné Char, Moulin Premier (1934-1935)
« [...] Un désir indéniable à mon temps est de séparer comme en vue d’attributions différentes le double état de la parole, brut ou immédiat ici, là essentiel.
Narrer, enseigner, même décrire, cela va et encore qu’à chacun suffirait peut-être pour échanger la pensée humaine, de prendre ou de mettre dans la main d’autrui en silence une pièce de monnaie, l’emploi élémentaire du discours dessert l’universel reportage dont, la littérature exceptée, participe tout entre les genres d’écrits contemporains.
À quoi bon la merveille de transposer un fait de nature en sa presque disparition vibratoire selon le jeu de la parole, cependant ; si ce n’est pour qu’en émane, sans la gêne d’un proche ou concret rappel, la notion pure.
Je dis : une fleur! et, hors de l’oubli où ma voix relègue aucun contour, en tant que quelque chose d’autre que les calices sus, musicalement se lève, idée même et suave, l’absente de tous bouquets.
Au contraire d’une fonction de numéraire facile et représentatif, comme le traite d’abord la foule, le dire, avant tout, rêve et chant, retrouve chez le Poète, par nécessité constitutive d’un art consacré aux fictions, sa virtualité.
Le vers qui de plusieurs vocables refait un mot total, neuf, étranger à la langue et comme incantatoire, achève cet isolement de la parole : niant, d’un trait souverain, le hasard demeuré aux termes malgré l’artifice de leur retrempe alternée en le sens et la sonorité, et vous cause cette surprise de n’avoir ouï jamais tel fragment ordinaire d’élocution, en même temps que la réminiscence de l’objet nommé baigne dans une neuve atmosphère. »
Stéphane Mallarmé, La crise de vers, Divagations (1897)
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Commentaire(s)
Mallarmé à corriger
"le, double état de la parole,"
et
"aux fiions"
Poésie du binaire
Homme – machine, avantage au poète du binaire “soumis” à la machine
« Le vers est un énoncé linguistique soumis à des contraintes formelles d’ordre métrique. Du respect de telles contraintes, implicites ou explicites, dépendra, dans une culture donnée et à une époque donnée, la reconnaissance d’un énoncé en tant que vers. Les auteurs des pages Internet les plus lues sont donc les poètes du début du troisième millénaire. Le postulat peut paraître osé voire délirant, il n’est peut-être que terrifiant.
Il ne fait aucun doute que nous sommes de plein pied dans la culture Internet. Communication, politique, économie, culture sont aujourd’hui soumis aux règles édictées par les tenants de leur promotion : les moteurs de recherche (au pluriel après une longue hésitation portée par une vague lueur d’espoir autosuggérée).
Ce sont des robots qui décident qui, quoi, est bon ou mauvais. La diffusion d’un concept ou d’une idée ne dépend plus du jugement humain mais de la qualité de son énoncé selon des règles mathématiques. Je suis bien le premier à être convaincu que le jugement humain est faillible, doux euphémisme, mais, malgré un amour profond des chiffres, j’ai du mal à admettre que la créativité humaine soit jugée par un flot d’électrons à travers des composants métalliques et du sel selon un processus logique binaire. Ce processus a certes été établi par des hommes, créatifs sans aucun doute mais les démonstrations que ce protocole leur échappe de plus en plus se multiplient.
Les régularités formelles et systématiques, la métrique, de cette nouvelle poésie soumise aux mathématiques s’appliquent aux deux piliers du positionnement d’une page : l’ancre des liens qui la pointe et la structure textuelle de la page elle-même.
Du nombre de liens vers la page dépend une part importante de son succès. Ces liens n’auront que plus de poids par la qualité de leur “copinage”, depuis une page au pinacle de l’internet plutôt qu’une page écrite par un obscure pigiste de campagne. L’ancre de ce lien sera un vers court et concis qui devrait ne pas trop dépasser cinq à sept mots et s’articuler autour d’un ou deux mots des plus importants de la page où il est énoncé et d’un ou deux mots de la page qu’il cible ; le défi n’est pas des moindres d’autant plus qu’il est d’une grande importance que chacune de ces ancres, chacun de ces vers soit original…
La métrique de la page est elle aussi très précise autant que floue. La page est constituée d’un à plusieurs paragraphes et 500 caractères semblent être le strict minimum de son texte, hors titre, description et sous-titres. Le maximum de la page, lui, se calcule en octets, un octet est composé de 8 chiffres binaires, 8 bits ; le poids de la page ne devrait pas trop dépasser, code et texte, 160′000 chiffres binaires (ne soyons pas plus taquin que Taquin le Matheu : 20 ko). Le concept, la requête visée, de la page sera exprimé en une formulation, de deux à quatre mots de préférence, en début de titre, de description, de sous-titres, de paragraphes, de phrases. Gras, italique ou souligné de cet énoncé pourraient bien encore représenter un plus. Ne manquons pas tout de même de souligner que les règles de cette poésie moderne sont pour le moins susceptibles de moult modifications et revirements brutaux et fantasques au gré de… Allez savoir… Clin d’œil amusant : il semblerait qu’actuellement un petit plus soit accordé à l’emploi de quelques mots plus rares, sophistiqués ou même désuets.
Il ne fait que peu de doute qu’il faut faire preuve de dispositions, d’aptitudes, de capacités naturelles, ou acquises, afin de faire passer un message en 2011, de faire passer un message par l’intermédiaire d’Internet ; il faut du talent. Mais que penser d’un talent jugé par des machines ? La reconnaissance semblerait bien n’être accessible que par l’expression de la créativité artistique humaine sur le terrain de jeux, et avec les armes, de la machine… Terrifiant n’est-il pas ? »
Posté par Alain Leresche sur Moteurzine le 23 Mai 2011.
En réponse à Poésie du binaire par politpro
Le style de la poésie du binaire
« Le secret est sans doute là. Positionner une page Internet nécessite le respect de moult règles ; certains mots importants doivent être placés dans les titres, sous-titres, en tête de paragraphe, dans le balisage, répétés un maximum de fois alors que d’autres doivent être dilués, remplacés par des synonymes, les articles et adverbes sont utilisés avec parcimonie, les verbes sont de préférence à l’infinitif, etc. L’écriture du texte d’une page visible dans les moteurs implique un style ; l’avenir est aux poètes du binaire… »
Insolvable monde
Ô petite pièce de monnaie, tu nous en dis haut sur l'absente de tous bouquets.
Mais aussi résonne au plus bas ton concret rappel.
Que le monde est insolvable, l'économie à découvert.
Nécessaire.
Mais non bancaire.
Pour une neuve atmosphère.
En réponse à Insolvable monde par Polit'producteur (non vérifié)
Le sans tête
D'un être en dette l'autre
La faute en défaut
Prise de tête
Capital sans queue ni tête
Caput Kaput
Qu'il se découvre
Au passage
Dans l'impasse
En réponse à Le sans tête par Polit'producteur (non vérifié)
Triple Ah!
Notons la criée
Ah! Ah! Ah!
L'immonde est en faillite
La faille enfin s'ouvre
Tranche la clôture
Avale actions, titres et obligations
Et couvrant un gémissement de bête blessée à mort
À tue-tête
Crie
Faut ce qui faut!